Bande dessinée: départ en lion
Le Journal de Montréal
Deux artistes au sommet de leur art. Deux albums exceptionnels. Michel Rabagliati et Philippe Girard lancent magistralement la rentrée automnale québécoise.
Que diantre pouvait donc faire le québécois Philippe Girard après son extraordinaire Leonard Cohen, sur un fil publié chez Casterman en 2021 ? Un autre grand livre, rien de moins. Second titre publié chez le célèbre éditeur belge, le bédéiste se penche cette fois-ci sur la palpitante vie du Canadien Gérald Bull, un scientifique devenu marchand d’armes.
« Mon plus grand rêve d’auteur était d’être du catalogue de Casterman, où furent publiés les Tintin. Une fois fait, ils m’ont contacté à ma grande surprise pour un nouveau projet. Après leur avoir proposé quelques idées, ils m’ont envoyé un scénario sur Alan Turing. Ça m’a ouvert les yeux sur leur volonté d’aller dans une certaine direction, raconte Girard. C’est là que j’ai pensé à Bull. Cette année marque le 20e anniversaire de l’envahissement de l’Irak par les États-Unis, et Bull était au cœur de cette guerre ».
La mort d’un rêve
En effet, le scientifique s’acharnait depuis plusieurs décennies à développer un supercanon permettant la mise en orbite de satellite. Hélas, l’Histoire nous rappelle tristement que les forces militaires récupèrent les avancés scientifiques pour d’autres desseins. L’album pose la question suivante : jusqu’où doit-on aller pour réaliser ses rêves ? Pour Bull, le prix à payer fut une balle dans la nuque. Obsédé par la volonté de mener à terme son projet, il va jusqu’à accepter de flirter avec des forces destructrices.
Alors qu’il est dépeint comme un traître dans les livres d’Histoires, l’artiste le considère davantage comme un homme naïf.
« Si on s’intéresse à sa vie de manière journalistique ou objective, c’est le parcours d’un homme qui joue à un jeu très dangereux qu’on effleure. Comment peut-on construire des armes et être naïf au point de croire que l’industrie de l’armement ne voudra pas ensuite les récupérer ? Aussi paradoxal que cela puisse paraître, Bull était un humaniste. L’homme était animé par de nobles intentions. Très tôt dans son parcours, il fut manipulé. » C’est autour de cette idée que l’album s’articule. Comme pour Cohen, Girard traverse de l’autre côté de la façade et nous convie dans les coulisses psychiques d’un rêveur. Par le truchement du réalisme magique, il humanise Bull, le dote d’une épaisseur. Alors que la vie documentée de Gérald Bull tient en à peine 15 pages, l’auteur réussit à en faire un être de chair, complexe, multiple, auquel on s’identifie par le biais de ses contradictions.
Un pari réussi
« J’ai vite aimé mon personnage. Des gens de mon entourage l’ayant connu m’ont confirmé qu’il était un homme foncièrement bon, chaleureux. Paradoxalement, il vendait des armes. Cette tension était suffisamment forte pour propulser le récit. » Comme le supercanon de Bull, c’est à une altitude stratosphérique que Girard projette son récit. Il livre un album au découpage haletant, goulûment illustré et bonifié de somptueuses doubles pages rappelant les grands maîtres Jack Kirby et Will Eisner.
Il aura fallu patienter dix ans avant qu’arrive finalement la quatrième génération du Murano, que la clientèle n’attendait plus. Un véhicule qui avait révolutionné le marché du multisegment en 2003, avec une approche stylistique originale et audacieuse, dans un format qui était à l’époque encore rare sur le marché. Depuis, de nombreux véhicules sont venus rivaliser avec lui, incluant le Ford Edge, récemment mis sur une tablette.