«J’ai vu des gens pleurer et se serrer»
Le Journal de Montréal
PARIS | Lors d’un concert festif comme ils en ont le secret et particulièrement riche en émotions, les Cowboys Fringants ont accompli hier un exploit dont très peu d’artistes québécois peuvent se vanter : faire vibrer des milliers de spectateurs dans le célèbre Accor Arena de Paris.
Après le Zénith et l’Olympia, c’était au tour de l’amphithéâtre autrefois connu sous le nom de Paris-Bercy, lieu mythique qui a vu défiler toutes les plus grandes stars de la musique, de succomber aux irrésistibles mélodies de même qu’à l’énergie contagieuse du groupe québécois et de ses loyaux admirateurs.
Comme lors du premier arrêt de la tournée européenne, à Lyon, vendredi, les fans ont été gâtés. Les Cowboys Fringants ont bâti un concert sous forme de rétrospective de leur glorieuse carrière, en mettant résolument l’accent sur les titres les plus énergiques de leur répertoire.
Dès le départ, ils ont enchaîné Les maisons toutes pareilles, Bye Bye Lou, La reine et une reprise survoltée de Smells Like Teen Spirit, de Nirvana, qui a fait bondir le parterre.
« Quelle soirée ! » s’est exclamé le chanteur Karl Tremblay.
Ça ne faisait que commencer. Le pied est demeuré sur l’accélérateur jusqu’aux deux rappels, où l’enchaînement de Marine marchande, Les étoiles filantes (avec l’envol dans la foule de centaines d’avions en papier, clin d’œil au texte de la chanson et charmante tradition des fans européens) et L’Amérique pleure a conclu le concert sur la plus belle des notes.
« Le Centre Bell, en Europe »
Rencontrés après le spectacle, Karl Tremblay et Marie-Annick Lépine savouraient le moment.
« C’est comme le Centre Bell, mais en Europe. C’est complètement fou. Les Européens nous voient une fois par année, mais ils sont 10 000 à venir chanter nos chansons, à danser, à bouger. J’ai vu des gens pleurer et se serrer dans leurs bras en avant », a dit le chanteur des Cowboys.
Installé à New York tout l’automne, l’humoriste Mathieu Dufour se demandait si la Grosse Pomme allait «virer à l’envers» le soir de l’élection américaine, au moment où Le Journal l’a contacté, mardi après-midi. «J’ai bien hâte de voir s’il va y avoir des répercussions», a dit celui qui en a profité pour annoncer un nouveau spectacle de Noël avec une chorale de 100 chanteurs.
Pour la journaliste et chroniqueuse d’origine haïtienne Anne-Lovely Etienne, le regretté Herby Moreau a représenté un monde des possibles en devenant l’une des premières figures de la communauté noire à avoir couvert – et à avoir fait partie – du star-system québécois. «Il m’a permis de me dire: moi aussi, je peux le faire», confie-t-elle.
Les Cowboys Fringants ont poursuivi sur leur lancée dimanche soir. Après avoir vu l’album et la comédie musicale Pub Royal rafler cinq Félix mercredi, lors des deux premiers galas, le groupe de Repentigny a ajouté trois statuettes à sa cagnotte au principal Gala de l’ADISQ, animé par Pierre-Yves Roy-Desmarais. Parions qu’il y a un Karl Tremblay qui était bien fier de ses comparses là-haut.
Ils sont au cœur de la chanson québécoise et créent des œuvres qui marquent des générations et des moments de vie à jamais; pourtant, en plus de vivre dans l’ombre, les paroliers québécois ne parviennent pas à gagner leur vie avec leur passion. «Personne ne peut vivre de sa plume en chanson au Québec en ce moment », estime la parolière Ève Déziel.
Finalistes dans sept catégories, dont quatre au gala dominical, Les Cowboys Fringants ont tous les éléments en main pour être les grands gagnants de l’ADISQ cette année. L’excellent album Pub Royal, tiré de la comédie musicale du même nom et auquel le chanteur Karl Tremblay a prêté sa voix avant son décès, a été acclamé de toutes parts à sa sortie au printemps. Si cela s’avérait le chant du cygne pour les Cowboys, ils auraient de quoi partir la tête très haute. Voici les coups de cœur et prédictions de nos journalistes pour ce 46e Gala de l’ADISQ.
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