Le moteur VC-Turbo de Nissan sous enquête
Le Journal de Montréal
Il devait être révolutionnaire et permettre un gain de puissance doublée d’une grande économie de carburant grâce à une technologie de taux de compression variable. Nissan l’a baptisé VC-Turbo. Cette technologie est d’abord arrivée sous le capot de l’Infiniti QX50, qui troquait alors un moteur V6 pour ce nouveau quatre cylindres turbocompressé de 2 litres. Produisant 268 chevaux, Nissan l’avait accouplé à une boîte automatique à variation continue qui n’allait certainement pas contribuer aux performances de cette mécanique.
Cette combinaison de moteur à taux de compression variable et de boîte de vitesse à rapport continuellement variable allait hélas aboutir à un taux de satisfaction…variable ! Parce que les performances ne sont pas à la hauteur des attentes et parce que la consommation n’est qu’impressionnante que si la mécanique n’est aucunement sollicitée. Le succès mitigé du QX50 et du QX55 (qui allait suivre deux ans plus tard) s’explique d’ailleurs en grande partie par cette motorisation, qui ne convainc même pas au moment d’en faire l’essai.
Également glissée sous le capot de certaines versions de l’Altima aux États-Unis, cette motorisation risque malheureusement de se retrouver également sous le capot du futur Nissan Murano, qui débarquera dès l’an prochain. Mais le comble, c’est qu’on a choisi chez Nissan d’éliminer le vénérable quatre cylindres de 2,5 litres atmosphérique du Rogue pour le remplacer en 2022 par un moteur à trois cylindres turbocompressé de 1,5 litre. Essentiellement, ce même 2,0 litres utilisé sans le QX50, auquel les ingénieurs ont retranché un cylindre. Le tout, pour gagner du couple et quelques dixièmes de litre par 100 km de carburant. Or, là aussi, le rendement déçoit. À commencer par une sonorité tout sauf envoûtante et par cette impression d’une mécanique indigne de ce type de véhicule. Et puisque la mécanique travaille d’arrache-pied, la consommation annoncée par Nissan est au final difficilement réalisable.
Naturellement, les faibles ventes du QX50 n’allaient pas suffire à s’interroger sur la réelle efficacité de cette technologie. Or, les nombreuses plaintes répertoriées aux États-Unis par des propriétaires de Nissan Rogue ont forcé la NHTSA (National Highway Trafic Safety Association) a ouvrir une enquête quant à la qualité et la viabilité de celle-ci. Les consommateurs se plaignent notamment de perte de puissance soudaine, de bruits de cognement, d’avoir retrouvé des parcelles métalliques dans le carter d’huile, lorsqu’il ne s’agit pas carrément d’une panne de moteur. Et sans surprise, ils se plaingent également d’une consommation plus élevée que promise. Maintenant, s’il est vrai que Nissan a modifié en cours de production sa motorisation en améliorant la qualité des roulements du vilebrequin, aucun rappel ou bulletin de service n’a encore été émis par le constructeur.
Pour 2024, Nissan équipe de série l’ensemble des Rogue vendus sur notre marché, alors que les modèles S de 2022 et 2023 profitaient encore du quatre cylindres atmosphérique offert sur l’ensemble de la gamme en 2021. Considérant le rendement décevant de cette motorisation de même que les nombreux problèmes qui s’y rattachent, il m’est donc désormais difficile de recommander l’achat d’un Nissan Rogue. Même chose pour le QX50/55 d’Infiniti, qui de toute manière, fait face à une concurrence très féroce. Ironiquement, il est possible en optant pour le Mitsubishi Outlander de bénéficier de l’ancienne motorisation du Nissan Rogue. Elle est également toujours offerte sous le capot de la Nissan Altima à quatre roues motrices, laquelle a prouvé sa grande fiabilité et sa frugalité au fil des ans.
Est-ce que la technologie VC-Turbo se résumerait ainsi à une bonne idée mal exécutée? Il faudra bien sûr attendre les résultats d’enquête de la NHTSA pour le savoir. Cela dit, il existe actuellement sur le marché une multitude de motorisations fiables et éprouvées qui ne vous feront guère courir de risque. En espérant bien sûr que Nissan puisse corriger et prouver l’efficacité de ces motorisations, qui auraient en plus tout intérêt à faire équipe avec de meilleures boîtes automatiques.
Si peur et plaisir ne semblent pas spontanément aller de pair, de nombreuses personnes raffolent pourtant des films d’horreur ou encore des sports extrêmes d’hiver, par exemple. Sans oublier ces montagnes russes toujours plus vertigineuses qui, chaque été, attirent les foules. Comment expliquer qu’autant de gens semblent parfois vouloir avoir peur ?