Prostitution juvénile: impossible de refaire une opération Scorpion
Le Journal de Montréal
Malgré l’omniprésence du phénomène, il serait pratiquement impossible de déployer aujourd’hui une opération comme Scorpion qui avait permis, il y a plus de 20 ans, de donner un électrochoc en matière de prostitution juvénile.
Huit mois d’enquête, 61 victimes mineures, une vingtaine de proxénètes et 17 clients condamnés, dont l’animateur Robert Gillet: l’opération Scorpion avait choqué en 2002, alors que les autorités venaient de démanteler un vaste réseau d’exploitation sexuelle à Québec.
«Mais on dirait que le temps a passé», constate Roger Ferland, l’enquêteur principal au dossier, à l’époque.
Le policier retraité ne cache pas sa déception: la prostitution juvénile est toujours bien implantée à Québec et au Québec, malgré Scorpion.
«Pendant un certain temps, la demande était moins forte un peu, les gens avaient peur de se faire prendre. Présentement, la peur de se faire prendre n’est pas là, surtout avec la facilité des réseaux sociaux», déplore-t-il.
Reste qu’une opération de ce genre serait difficile à reproduire deux décennies plus tard, s’entendent les forces policières. Les réseaux de prostitution n’existent pratiquement plus et les proxénètes agissent désormais pour leur bénéfice personnel, constatent les policiers.
«On parle de proxénètes qui ont deux ou trois filles [...] ils le font pour leur propre business. C’est des silos», constate Annie Bergeron, de l'Escouade intégrée de lutte contre le proxénétisme (EILP).
Au surplus, une opération comme Scorpion prend du temps et les autorités ne peuvent se permettre de mener une enquête d’envergure, en sachant qu’une personne vulnérable est victime d’exploitation sexuelle.
«C’est pas pensable de faire un projet à long terme avec des gens en proxénétisme, parce que le temps qu’on agisse, on a quand même une jeune femme ou un jeune homme qui subit une agression sexuelle ou qui est violenté», avance l’inspectrice Marie-Manon Savard, de la police de Québec.