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«L’homme du Nord»: le festival de la testostérone
Le Journal de Montréal
Alexander Skarsgard et son réalisateur, Robert Eggers, donnent un peu (trop?) dans la brutalité gratuite.
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Surfant sur la vague des excellentes séries «Vikings», «Valhalla» et «Le dernier royaume», Robert Eggers tente de porter une légende nordique au grand écran. Malheureusement, il tombe dans le travers qu’ont su éviter – fort adroitement d’ailleurs – les séries: se complaire dans une surdose de violence gratuite... surtout envers les femmes.
La légende scandinave d’Amleth (Alexander Skarsgard) en est une de vengeance – elle a d’ailleurs été reprise par Shakespeare dans son «Hamlet» puis par Disney dans son «Roi lion». Le prince jure d’occire son oncle Fjölnir (Claes Bang), coupable d’avoir étêté sauvagement son père (Ethan Hawke) et enlevé sa mère (Nicole Kidman). Après 20 d’exil dans la Rus (l’ancêtre de la Russie), Amleth revient sur les terres de Fjölnir afin de le massacrer.
Ce résumé succinct ne doit pas faire oublier que la légende nordique qui a servi de base au scénario nous vient des XIIe et XIIIe siècles et a été écrite en latin par un théologien, bien longtemps après la christianisation des peuples Vikings (ceux qui suivent les séries télévisées comprendront toute l’importance de ce fait).
Le scénario de Robert Eggers et de Sjón, auteur islandais et, entre autres, parolier de Björk (elle effectue d’ailleurs une apparition en devineresse), est donc résolument une histoire d’hommes – lire «mâles» - à la musculature proéminente qui se livrent avec une cruauté naturelle à toutes les exactions possibles – viols, pillages, meurtres et anthropophagie. Évidemment, le but en est «noble», car il s’agit de venger son père, de sauver sa mère – prise de guerre de l’oncle fourbe – et de reconquérir le royaume.
Afin d’enrober cette surenchère d’hémoglobine, les scénaristes ont inclus (et là, les amateurs d’Histoire apprécieront) l’aspect ésotérique du polythéisme viking. Divination, drogues hallucinogènes (le visuel de l’arbre de vie est une bien malheureuse trouvaille aux effets spéciaux bâclés), communion avec la nature et les animaux figurent donc au menu de ce «L’homme du Nord». Et c’est là l’aspect le plus intéressant. Car, débarrassé de cette cacophonie de violence, le spectateur trouve enfin dans le film une exploration de la spiritualité nordique – incluant la notion de fatalité et de destin –, ce qui constitue une réflexion hautement plus intéressante qu’une succession de brutalités qui ne servent à rien.