Trou l’immortelle: la fable aquatique de Camille Thibodeau
Le Journal de Montréal
Si elle n’a jamais fait cette fugue imaginée et planifiée dans son journal intime d’adolescente, c’est une véritable fugue dans un univers aquatique, animal et poétique que Camille Thibodeau nous offre avec son premier roman Trou l’immortelle.
Née à Chandler, Camille Thibodeau a grandi face à la mer. Enfant solitaire, c’est dans sa « bulle » de lecture et d’écriture qu’elle se sentait le mieux. Lorsqu’elle parlait avec les animaux aussi. Encouragée par ses parents, elle plongeait – et plonge toujours – dans les contes. De fées tout d’abord, puis d’histoires d’horreur.
« Il y a beaucoup de poésie dans les contes de fées, dit l’autrice de 23 ans. Il y a quelque chose de brut et de naïf, mais aussi de proche de la réalité et de franc. »
À 16 ans, elle partait étudier en création littéraire à Québec puis la littérature à Montréal. « Depuis que je sais écrire, je sais que je veux faire cela, ajoute celle qui termine actuellement une maîtrise en recherches et création. La ville est un endroit où je peux être entourée et seule en même temps. J’aime que ce soit fourmillant, c’est inspirant ! »
Un exercice de style(s)
« Pour moi, l’écriture est depuis toujours un espace de liberté et de plaisir, explique l’écrivaine qui renoue avec ses vieilles amours en mettant en scène des personnages d’animaux dans Trou l’immortelle. Je ne vois pas de raisons de s’imposer de limites, car c’est de la création. Écrire, c’est de la création et du partage. On invite les gens dans un univers. »
Dans son œuvre qu’elle qualifie de « roman poétique », Camille Thibodeau a pris comme point de départ un événement marquant de son passé gaspésien : la fermeture de l’usine de Chandler qui coïncidait avec la venue l’an 2000. Le tout lui permettant de créer une atmosphère de fin du monde en ouverture de roman.
Puis est venu se greffer un personnage hors du commun : une fille « qui se fait traiter de truite et qui, finalement, devient ce qu’on voit en elle ». Une fille au visage de truite, donc, plongeant dans l’océan et fuyant dans les abysses. Un personnage qui a du tact, qui ne se laisse pas abattre par les mots et « qui joue avec eux au point de les intégrer et de devenir les mots. »
« Ça parle de la fuite, de la métamorphose, d’une quête de liberté, d’une fuite physique autant que dans son propre imaginaire, explique l’autrice qui affectionne le fantastique dans lequel se glissent des enjeux sociaux. Ce qui arrive quand tu es comme condamné par le regard des autres. Quand tu es banni d’un endroit, qu’est-ce que tu fais ? »
Si peur et plaisir ne semblent pas spontanément aller de pair, de nombreuses personnes raffolent pourtant des films d’horreur ou encore des sports extrêmes d’hiver, par exemple. Sans oublier ces montagnes russes toujours plus vertigineuses qui, chaque été, attirent les foules. Comment expliquer qu’autant de gens semblent parfois vouloir avoir peur ?