![Un ministère de l’Environnement vert pâle](https://m1.quebecormedia.com/emp/emp/Crops8f49c3db-c402-4358-83ff-2f9697c0c76d_ORIGINAL.jpg?impolicy=crop-resize&x=0&y=418&w=2000&h=825&width=1200)
Un ministère de l’Environnement vert pâle
Le Journal de Montréal
Avoir des préoccupations environnementales, ça paraît bien, mais lorsqu’il s’agit de choisir entre planter des arbres et raser un boisé pour construire un nouveau centre commercial, c’est souvent le deuxième qui l’emporte.
L’auteur Louis-Gilles Francœur a été pendant 30 ans journaliste et chroniqueur spécialisé en environnement au quotidien Le Devoir. Il est donc bien placé pour mesurer le chemin parcouru au sein du ministère de l’Environnement, créé officiellement en 1979, et juger des efforts réels des gouvernements en matière de protection environnementale. Bien placé également pour décortiquer « une mécanique qui permet de voir comment, pour ainsi dire de l’intérieur, se déploie – et dérive – une politique publique au gré des forces qui s’exercent sur elle » (Robert Laplante, en préface).
Les auteurs se penchent ici sur trois grands dossiers : le programme d’assainissement des eaux du Québec ; la restauration des sites miniers ; et la lutte contre la crise climatique via le Fonds vert. Ils espèrent ainsi « lancer une réflexion, voire un débat sur la place et l’importance que devrait occuper le ministère de l’Environnement dans l’appareil étatique du Québec ».
Selon eux, la mission première d’un tel ministère est de « neutraliser les menaces qui pèsent sur les écosystèmes et la qualité de vie des espèces vivantes, humains compris, ce qui implique d’identifier les causes des problèmes environnementaux et de contrôler le comportement et les activités des acteurs sociaux qui les engendrent ».
Francœur avoue aimer le ministère de l’Environnement et ses fonctionnaires, et c’est pour cette raison qu’il lance un cri d’alarme. Ce qu’il dénonce, en fait, c’est le peu d’importance que lui accordent, en général, les plus hautes instances gouvernementales, ce qui se manifeste, entre autres, par des budgets anémiques (depuis sa création, ce budget oscille entre un tiers ou un demi de 1 % du budget global de l’État).
Vaste champ d’action
Pourtant, les préoccupations écologiques des Québécois ne datent pas d’hier, elles remontent à la fin des années 1950, alors qu’on assiste aux premières initiatives gouvernementales en matière d’assainissement, avec l’adoption de la Loi concernant la pollution des eaux, et la création de la Régie d’épuration des eaux. Jusqu’alors, les cours d’eau constituaient de véritables « égouts à ciel ouvert », souvent « entrecoupés de barrages pour la production d’hydroélectricité au profit de compagnies privées ». On portait peu attention « aux impacts de ces activités sur les écosystèmes aquatiques et riverains ».
Avec l’éveil des Québécois aux préoccupations écologistes, les entrepreneurs et les ministères à vocation économique qui les soutiennent développeront de nouvelles stratégies pour contourner les oppositions, comme la diminution des budgets du MEQ, la réduction des effectifs en matière d’inspection, l’allègement des exigences d’analyse préalable, l’accélération de l’évaluation des projets et l’alourdissement des procédures administratives et des missions d’étude d’impacts, entre autres. Car le champ d’action du MEQ est vaste, allant de l’assainissement des eaux à la gestion des dépotoirs de produits dangereux, en passant par la pollution agricole et industrielle, les milieux humides, le réchauffement climatique, etc.
En un peu plus de 200 pages, les auteurs de cet ouvrage stimulant retracent l’histoire d’un jeune ministère, qui malgré sa petite taille et ses maigres budgets, joue un rôle capital sur la scène aussi bien nationale qu’internationale, et ils nous encouragent à être plus vigilants.