Vos gènes, la COVID-19 et vous
Radio-Canada
À 37 ans, Dominic Domen ne se souvient pas d’avoir été malade, si ce n’est une pierre au rein dans les années 1990. Pourtant, au printemps 2021, il a attrapé la COVID-19 et a bien failli y passer.
J’ai eu de la fièvre, des malaises et des vomissements, raconte-t-il devant le restaurant de Montréal où il cuisine des spécialités de son pays d’origine, les Philippines. Puis son état s’est dégradé rapidement. Mon poumon gauche s’est affaissé, mon foie et mes reins ont cessé de fonctionner, se souvient l’ancien infirmier, qui a depuis retrouvé son air enjoué.
Selon ses médecins, Dominic Domen a souffert d’un syndrome inflammatoire multisystémique provoqué par le virus. Une complication rare de la maladie.
Pourquoi lui? C’est un des inconnus qui persistent à propos du SRAS-CoV-2 : des gens apparemment sans facteurs de risque particuliers tombent pourtant gravement malades.
Pourquoi quelqu'un a eu une maladie grave et une autre personne n’a eu presque aucun symptôme? Ils ont le même âge, la même situation économique, les mêmes facteurs de risque comme l'obésité, le diabète... Mais malgré ça, il y a une grande différence dans la sévérité de la COVID-19, expose le Dr Brent Richards, endocrinologue à l’Hôpital général juif de Montréal.
Le Dr Richards fait partie d’un consortium international de chercheurs appelé COVID-19 Host Genetics Initiative. Selon ces experts, l’explication pourrait bien se trouver dans notre ADN.
En tant que clinicien, quand on voyait un jeune homme de 30 ans rentrer aux soins intensifs avec des poumons qui étaient complètement blancs à cause de la COVID, la question était toujours : pourquoi ça lui est arrivé?, relate son collègue, le microbiologiste-infectiologue à l’Université McGill Guillaume Butler-Laporte. Dans ces cas-là, en général, en médecine, ce qu'on se dit, c'est qu'il doit y avoir quelque chose de plus. Si on a éliminé l'environnement, les facteurs épidémiologiques, il reste vraiment juste la génétique.
Les chercheurs ont publié plusieurs articles au cours des derniers mois qui viennent appuyer l’hypothèse que nos gènes pourraient avoir une influence sur notre réaction à la COVID-19. Pour en arriver à ces conclusions, ils puisent dans de grandes biobanques qui colligent un peu partout dans le monde les échantillons d’ADN prélevés chez des centaines de milliers de personnes, y compris des gens qui ont souffert de complications de la COVID-19.
Ça leur permet de comparer les codes génétiques entiers, ou génomes, de grands groupes de patients. Ils cherchent dans les milliards de paires de bases, généralement représentées par les lettres A, C, G et T, des petites variations qui pourraient expliquer les différences cliniques observées.