Tranche de vie et réflexions à la frontière de la Russie et de l’Ukraine
Radio-Canada
DONETSK, région de Rostov en Russie — « Des soldats? Les nôtres? Où ça? Je n’en vois pas et je ne les entends pas. Il ne faut pas croire tout ce qu’on vous dit, jeune dame », me lance Vladimir, un retraité souriant qui marche d’un pas décidé, mais prudent, sur le trottoir glissant qui mène à son immeuble à logements.
Nous sommes dans une petite ville qui s'appelle Donetsk, mais qui n’a rien à voir avec le territoire séparatiste ukrainien qui porte le même nom, quoique l’Ukraine soit à moins d’un kilomètre de nous. Vladimir la voit de son balcon.
La ville de 50 000 habitants ressemble à toutes les autres de la région : deux ou trois églises orthodoxes, quelques supermarchés et restaurants, de petits drapeaux russes sur tous les lampadaires et plusieurs monuments à la mémoire des héros de la Grande Guerre.
« On a perdu 50 millions d’hommes. Il faudrait être fou ou complètement malade de nos jours pour en déclencher une autre. »
Vladimir ne croit pas une seconde à la possibilité d’une invasion russe de l’Ukraine. Regardez autour de nous, il ne se passe rien.
Il y a beaucoup de va-et-vient en ville ce matin de février, mais il n'y a pas un soldat en vue à la frontière. Pas l’ombre d’un char non plus. Aucun de ces déploiements monstres que l'on connaît pourtant dans la région (images satellites à l'appui) et dont le Kremlin confirme l'existence en les qualifiant de simples exercices militaires.
Pourquoi une telle manifestation de force? Vladimir hausse les épaules, et bien qu’il n’ait pas l'habitude des caméras et des micros, il n’hésite pas à livrer son analyse de la situation.
« Dites-moi plutôt ce que des soldats canadiens font en Ukraine? Et les Américains aussi? Pourquoi les Anglais fournissent-ils des armes à Kiev? Eh bien, c’est tout simple, c'est pour attaquer la Russie, évidemment. »
Il soutient à 100 % son président Vladimir Poutine et juge que la Russie a intérêt à se protéger des foudres de l’Organisation du traité de l'Atlantique nordOTAN. Il perçoit dans les tensions et l'enflure militaire actuelles une provocation dangereuse et un complot de l’Occident pour nous diviser de nos frères ukrainiens.