Soudan : des généraux en guerre contre eux-mêmes et contre leur peuple
Radio-Canada
La guerre du Soudan est entrée dans sa troisième semaine. Depuis le 15 avril, deux généraux se battent pour le pouvoir, après avoir combattu ensemble les aspirations de la société civile pendant quatre ans.
On assiste à des combats à l’arme lourde, avec des tirs et des bombardements dans la capitale Khartoum et une possible reprise de l’épuration ethnique au Darfour, région de l’ouest à forte minorité non arabe, 20 ans après les tristement célèbres massacres des milices Janjawids.
Pendant ce temps, la communauté internationale évacue ses ressortissants. Réflexe classique des gouvernements étrangers, lorsque ça se met à barder dans un pays : évacuer les expatriés, chercher la sécurité par des rapatriements précipités.
On peut le comprendre du point de vue des premiers intéressés, mais en même temps, le sentiment d’abandon des Soudanais est poignant.
Ce pays avait, depuis l’automne 2018, avec des zigzags et des ratés, mais aussi avec énormément de détermination et d’espoir, entrepris une transition démocratique qui semblait prometteuse.
Une jeunesse urbaine mobilisée, des associations professionnelles dynamiques (avocats, médecins), des hommes et des femmes (surtout des femmes) s’étaient engagés en faveur de la démocratie et contre l’islamomilitarisme dont ce pays est un bastion historique.
Cette transition était soutenue par un certain nombre de pays étrangers – y compris occidentaux : Canada, États-Unis – qui l’avaient encouragée… et qui aujourd’hui semblent l’abandonner à son sort, dans ce sauve-qui-peut général.
En avril 2019, il y a tout juste quatre ans, ce mouvement avait chassé un dictateur célèbre, Omar el-Béchir, connu pour sa férocité : un ami des ben Laden et autres islamistes radicaux, condamné par la Cour pénale internationale pour les massacres au Darfour dans les années 2000.
Ceux qui l’ont remplacé en 2019 avaient dans un premier temps – tout comme le général Abdelfattah al-Sissi dans l’Égypte voisine en 2011 – reconnu le puissant mouvement civil de Khartoum et lancé une (apparente) transition vers la démocratie.