Revitalisation du bassin Peel : des craintes d’un nouveau Griffintown
Radio-Canada
« Si vous regardez Griffintown, on n'en veut pas à Pointe-Saint-Charles », lance Jocelyne Bernier, qui habite le quartier du sud de Montréal depuis plus de quatre décennies.
Les groupes communautaires du quartier, qui militent depuis plusieurs années pour un développement à échelle humaine du secteur du bassin Peel, craignent que le site ne devienne le prolongement du nouveau quartier qui a poussé de l'autre côté du canal de Lachine.
Le secteur est dominé par l'industrie lourde depuis plus d'un siècle. Autrefois, les navires accostaient aux bassins Peel et Wellington, près de l'embouchure du canal. Les trains, eux, sont toujours omniprésents dans le paysage. Une branche du futur Réseau express métropolitainREM survole même la rue Bridge.
Ici, c'étaient des entreprises, raconte Mme Bernier. Et là, je vois le quartier changer avec l'arrivée des condos. Je vois l'impact de la gentrification.
Certains promoteurs, qui possèdent des terrains dans le secteur au sud du bassin Peel, ont récemment dénoncé les orientations préliminaires de l'administration Plante. Alors que les constructeurs voudraient pouvoir ériger des tours de 12 à 25 étages, qui contiendraient jusqu'à 12 000 logements dans tout le secteur Bridge-Bonaventure, la Ville en proposerait trois fois moins, selon une version préliminaire du plan de développement qui a été présentée à divers partenaires.
La Ville a proposé un type de développement qui n'est clairement pas aussi haut que ce que [le promoteur] Devimco souhaitait, mais qui ne correspond pas non plus à la définition de l'échelle humaine des acteurs communautaires de Pointe-Saint-Charles, explique Karine Triollet, d'Action-Gardien, qui regroupe les organismes communautaires du quartier.
On ne dit pas que c'est seulement des triplex qu'on veut, précise Jocelyne Bernier. Mais il y a d'autres façons de densifier : plus d'espaces publics et verdis, moins de stationnements dans les rues, plus de rues conviviales.
Les organismes souhaitent également la création d'au moins mille logements sociaux, sur les terrains qui appartiennent aux gouvernements fédéral et provincial. La demande dans le quartier est énorme, affirme Francis Dolan, organisateur communautaire au comité logement de Pointe-Saint-Charles. Il y a plus de mille ménages qui paient plus de 50 % de leurs revenus pour se loger, et ce sont des chiffres de 2016 qui devront être revus à la hausse, explique-t-il.
Ce qu’il ne faut pas faire, c'est du développement comme ça s'est fait à Griffintown, pense aussi Mathieu Collette, fondateur et directeur général des Forges de Montréal, installées dans l'ancienne station de pompage Riverside, située à proximité du site. Il y a plein de promotion immobilière qui a été faite trop rapidement, le secteur est mal réfléchi, les rues sont trop étroites, selon lui.