Refondation de la Santé au Québec : un plan sur 5 à 10 ans
Radio-Canada
Le ministre Christian Dubé aura besoin d’au moins un autre mandat… et même de cinq à dix ans pour compléter sa fameuse « refondation de la santé ». Mais il est catégorique : « Il faut que l’aiguille ait bougé dans les quatre prochaines années. Ça pour moi c’est clair! », nous explique-t-il en entrevue.
L’aiguille a d’ailleurs déjà commencé à bouger, selon lui, puisque la pandémie a forcé son gouvernement à agir dès maintenant sur quatre fronts : améliorer les ressources humaines dans le réseau, faciliter l’accès aux données, moderniser les systèmes informatiques et rénover les infrastructures.
Dans les derniers mois, il a déposé des projets de loi pour mettre la table à son plan de santé, qu’il devrait rendre public au début du mois d’avril. Ainsi, le ministre pense avoir réuni tous les ingrédients de base. Reste maintenant à faire lever le gâteau. On la connaît la recette pour améliorer le réseau, assure-t-il.
Moi je ne veux pas que les Québécois soient déçus de la recette. Ils vont sûrement se dire : ben voyons donc! Il n’invente rien! […] C’est donc bien simple!. Les solutions se trouvent sous nos yeux depuis trop longtemps, d’après lui. Nombre de rapports ont été tablettés. Il pleut des recommandations depuis au moins 20 ans. Il y a bien des rapports où j’aurais pu juste changer la date, les republier et dire : comment ça se fait qu’on n’a pas fait ça?.
Christian Dubé baisse les attentes en ne promettant pas de réforme, ni de révolution. Pour lui, la clé de la refondation du réseau est beaucoup plus simple : tout est dans l’exécution des nombreuses propositions qui ont déjà été formulées aux gouvernements qui se sont succédé. Par exemple, il compte faire ressortir plusieurs éléments suggérés par la Commission Clair, dont le rapport a été déposé il y a… 20 ans!
En 2001, le président Michel Clair et ses huit commissaires avaient formulé 36 recommandations et 59 propositions. Christian Dubé se garde de révéler celles qu’il compte retenir, mais son gouvernement s’est déjà prononcé sur plusieurs d’entre elles. Par exemple, le rapport Clair proposait de revoir la rémunération des médecins, de recourir davantage aux centres locaux de services communautaires (CLSC), aux partenariats avec les cliniques privées, et aux corridors de service avec les cabinets de médecins spécialistes. C’est d’ailleurs à la suite de ce rapport que les premiers Groupes de médecine familiale (GMF) sont nés au Québec.
C’était des groupes de professionnels qui se mettaient ensemble pour sortir les gens de l’urgence, mais on n’est pas allé assez loin dans le principe. Je pense que les gens ont vu que les professionnels en temps de crise pouvaient collaborer ensemble […] il faut arrêter de travailler en silo, arrêter de dire que ça prend un médecin. C’est des équipes de travail. L’important pour le ministre c’est que chaque Québécois puisse avoir accès à un professionnel, et pas nécessairement un médecin . Par exemple, des pharmaciens, des infirmières et des psychologues sont appelés à contribution.
Pour parvenir à augmenter l’offre de services en première ligne, Christian Dubé a besoin de faire adopter son projet de loi 11, actuellement vivement contesté par les omnipraticiens. Il nous confie que des négociations de coulisses lui permettent d’espérer une adoption avant l’été.
Si les solutions sont connues depuis aussi longtemps, qu’est-ce qui a freiné les gouvernements avant lui? Il réfléchit à voix haute : est-ce que c’est parce qu’on n’a pas eu le courage? Est-ce que c’est parce qu’il y a eu un changement de gouvernement? C’est pas juste une question de savoir quoi faire, mais qui va le faire et est-ce qu’on a le courage de l’implanter.