Rammstein : une démesure de son et de… flammes
Radio-Canada
J’avais beau avoir vu les vidéos de leur tournée en Europe ces derniers mois, il fallait le voir en personne pour le croire. À côté de cette structure métallique qui n’est pas sans évoquer l’esthétisme de certains gratte-ciel de Metropolis, de Fritz Lang, les doubles scènes à Osheaga ont l’air d’un jouet.
Et nous étions nombreux à vouloir voir et entendre le groupe berlinois. Pas moins de 43 000 spectatrices et spectateurs se sont présentés sur l’île, certains plus hardis que d’autres. Les admirateurs les plus irréductibles se sont installés le plus près possible de la scène de 200 pieds de large, dans la feuerzone. C’est là où la fréquence des jets de lance-flammes provenant de la structure principale, des quatre tours arrière ainsi que des lance-flammes portatifs et du canon à feu donne l’impression d’être au milieu d’un BBQ perpétuel à ciel ouvert.
Pourtant, nul besoin d’être si près pour apprécier la qualité de l’offre musicale de la bande à Till Lindemann. Avec plus de 170 amplis LA12X, Rammstein avait à sa disposition plus de deux millions (!) de watts de son. Et ça s’entendait… Au parc Jean-Drapeau, bien sûr, mais aussi à Saint-Lambert, à Boucherville, à Saint-Bruno, bref, partout dans la région métropolitaine. Durant le concert, les réseaux sociaux étaient inondés de commentaires de gens qui entendaient à la perfection les fréquences lourdes de la basse d’Oliver Riedel et de la batterie de Christoph Schneider.
Malgré cette déferlante sonore, tout n’était pas question de volume. La définition des guitares de Richard Kruspe et de Paul Landers ainsi que des claviers de Christian Lorenz était impeccable. L’une des meilleures qualités sonores jamais entendues pour un concert de cette envergure.
C’est la question que je me posais il y a 10 ans quand je suis allé voir les Allemands au Centre Bell. Je suis sorti de là complètement abasourdi, et convaincu. Cela dit, les gens peuvent-ils aimer Rammstein s’ils ne sont pas des adeptes de métal industriel et, surtout, s’ils ne comprennent rien à langue de Goethe?
La réponse m’est venue ces derniers jours par l’entremise de plusieurs amis et de connaissances qui m’ont dit vouloir être au concert… pour le concert, justement. Pour le côté spectaculaire de la prestation. Pour le défoulement collectif digne de n’importe quel événement métal. Un commentaire lu sur les réseaux sociaux était particulièrement révélateur : Je n’aime pas leur musique, mais leurs shows sont trop fous.
Fous? Pas de doute. Mais aussi rassembleurs, surtout si l’on prend la peine d’aller plus loin que l’intérêt indéniable de la musique vitaminée du groupe.
Premières notes entendues à 20 h 06… celles de Music For the Royal Fireworks, de Georg Friedrich Handel. De la musique classique, tiens. Tout ça pour nous amener à Armee Der Trisen, une chanson où des légions de gens tristes et désespérés se voient offrir une main tendue afin d’adhérer au parti des sans-espoirs afin de retrouver le bonheur.
N’ayez crainte. Mon allemand se limite à la douzaine de mots usuels baragouinés à Berlin il y a quelques années, mais il y a un site français (Rammsteinworld.com) qui offre des traductions de toutes les chansons du groupe. On peut ainsi mieux mesurer la profondeur des chansons du groupe, voire, une certaine poésie de Lindemann.