Révolte en Iran : « un mouvement inédit dans le monde musulman »
Radio-Canada
La colère gronde et ne faiblit pas en Iran, bien au contraire. Le pays a entamé samedi sa quatrième semaine de manifestations malgré une répression policière mortelle et des slogans de plus en plus radicaux : « Mort à Khamenei [le guide suprême, première autorité du pays]! »; « C’est le régime lui-même qui est la cible! »
La révolte déclenchée par la mort d’une jeune femme, Mahsa Amini, après son arrestation par la police des mœurs pour le port jugé inapproprié du voile cible désormais tout le régime de la République islamique.
Il s’agit d’un mouvement profondément antireligieux [qui] ne se compare à aucun autre, un mouvement inédit dans le monde musulman, analyse la sociologue et politologue spécialiste de l'Iran Mahnaz Shirali à l’émission Les faits d’abord, sur Ici Première.
Les jeunes manifestants rejettent non seulement le voile islamique mais aussi la République islamique, l’islam et la loi islamique, poursuit Mme Shirali.
Au 14e jour des manifestations, des Iraniens, femmes et hommes, sont descendus dans la rue dans plusieurs villes, y compris à Téhéran. Des écolières ont agité leurs foulards, des salariés ont fait la grève et des affrontements ont opposé des manifestants aux policiers.
Les religieux au pouvoir ont tellement fait du voile un pilier de la République islamique qu’ils ont conscience du fait que si le voile tombe, le régime tombe, analyse de son côté Delphine Minoui, journaliste franco-iranienne spécialisée dans le monde iranien.
« [Les religieux au pouvoir] se rendent compte de l’engouement populaire qui dépasse les clivages sociaux, économiques, démographiques, ethniques aussi. Là, il y a vraiment quelque chose d’inédit. »
Aux yeux de Mme Minoui, la révolte est passée à un autre niveau : Les femmes, pour la première fois, sont au-devant de la scène de la contestation, dit-elle. Les manifestantes sont même soutenues non seulement par des Iraniennes en tchador qui prônent la liberté de choix de leurs consœurs mais aussi par des lycéennes et, plus inédit encore, par des lycéens.
Symétriquement, la répression s'est accentuée pendant le mouvement de contestation, le plus important depuis les manifestations contre la hausse des prix de l'essence en 2019. Face aux insurgés prêts à tout pour renverser le régime, la répression s'est durcie.