Pourquoi ne pas utiliser les eaux usées pour mieux suivre l’évolution de la COVID-19?
Radio-Canada
Depuis le début de la pandémie, de nombreux chercheurs canadiens analysent les eaux usées pour calculer la présence et la concentration de SRAS-CoV-2. Toutefois, ces données, même si elles ont fait leurs preuves, ont été peu utilisées par la plupart des autorités sanitaires canadiennes.
Partout au pays, les autorités n’arrivent plus à dépister toutes les personnes infectées par la COVID-19. Mais des chercheurs qui analysent la concentration du virus dans les eaux usées comprennent mal pourquoi on n'utilise pas davantage leurs données pour suivre l’évolution de cette vague, surtout au moment où les centres de dépistage ont atteint leur capacité maximale.
Nous savons que les eaux usées permettent de détecter le niveau de concentration du virus dans une communauté. Et l’avantage de cet indicateur est qu’il n’est pas lié aux tests cliniques. Tandis que nous avons dépassé la capacité des centres de dépistage et que les stratégies de dépistage changent, le signal provenant des eaux usées ne change pas, dit Robert Delatolla, professeur agrégé au Département de génie civil de l'Université d'Ottawa, qui analyse les eaux usées de la ville d'Ottawa depuis le début de la pandémie.
Sachant que les cas déclarés sont largement sous-estimés, les autorités se rabattent désormais sur le taux de positivité et sur le nombre d’hospitalisations pour suivre la progression de la transmission. Mais comme pour tous les indicateurs, ils ont des limites, rappelle M. Delatolla.
Par exemple, si le dépistage est limité à une tranche de la population, le taux de positivité devient moins fiable. Quant aux hospitalisations, il y a un délai d’environ deux semaines avant que la hausse ou la diminution des cas se reflète dans leur nombre. Il est donc plus difficile et plus long de voir si les mesures fonctionnent.
Sarah Dorner, professeure au Département des génies civil, géologique et des mines de Polytechnique Montréal, ajoute que les plateformes d’autodéclaration des infections, comme ce qui est proposé par le gouvernement du Québec, ne seront pas suffisantes. Ce n’est pas tout le monde qui va le faire, dit la professeure Dorner, qui travaille depuis six mois avec un groupe de chercheurs québécois qui analysent les eaux usées de la province.
C'est pourquoi, pour M. Delatolla, l'analyse des eaux usées offrirait un très bon aperçu du nombre de cas à venir et permettrait de voir quand il commencera à se stabiliser et à diminuer. Je pense que c’est un outil très précieux en ce moment. Ces analyses pourraient aider les autorités à mieux déterminer le moment de relâcher ou resserrer certaines règles sanitaires, croit-il.
Si ce type d’indicateur ne permet pas de quantifier un nombre exact de cas dans une région, il permet toutefois de voir un changement dans les tendances, avant même qu’on puisse voir le nombre de cas augmenter, expliquent Mme Dorner et M. Delatolla.
« Une fois que c'est dans les eaux usées, on sait très bien que le virus se propage dans la communauté. »