
Pourquoi la Chine pourrait suivre l’exemple de la Russie (ou pas)
Radio-Canada
La situation de l’Ukraine, perçue par la Russie comme une partie intégrante de son territoire, n’est pas sans rappeler celle de Taïwan, aux prises avec son puissant voisin chinois qui aimerait bien la ramener dans son giron. Xi Jinping pourrait-il s’inspirer de l’invasion russe et décider, lui aussi, de mener une attaque contre l’île rebelle?
Pas tout de suite, croit Daniel Blumenthal, directeur des études asiatiques à l'American Enterprise Institute, à Washington. Ce ne sera pas dans les semaines ni les mois à venir, note-t-il. Le Congrès du Parti communiste chinois, prévu pour cet automne et lors duquel M. Xi devrait être réélu, est une étape trop importante.
« Il a trop à perdre au cours de la prochaine année. Mais je pense qu'après cela, la pression va augmenter sur Taïwan. »
Ce qui est sûr, c’est que Xi Jinping observe la situation de près, remarque M. Blumenthal. Il regarde attentivement pour voir comment les États-Unis et l'Organisation du traité de l'Atlantique nordOTAN réagissent à l'agression et, s'il décide que la réaction est faible, cela l'encouragerait certainement à planifier des actions plus agressives contre Taïwan.
C’est également l’avis de Guy Saint-Jacques, ancien ambassadeur du Canada en Chine. Les Chinois vont étudier la réaction des Américains, ainsi que les sanctions imposées à la Russie pour voir si elles ont du mordant. À partir de cela, la Chine va finaliser ses plans. C'est pour cela qu'il est important que la réaction des Américains et des alliés soit très forte.
Le régime de sanctions à l’encontre de la Russie est encore en évolution, mais déjà les grandes banques ont été visées, ainsi que les secteurs de l’énergie et de la défense. Les importations russes de produits technologiques de pointe, tels que des semi-conducteurs ou des senseurs, sont restreintes. Plusieurs membres de l’élite, dont le président Poutine et son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, ont également vu leurs avoirs dans l’Union européenne gelés.
Xi Jinping aurait-il raison de croire que la réaction des Occidentaux, et en particulier celle des Américains, serait la même en cas d’invasion de Taïwan?
Il est loin d'être certain que ce serait le cas, estime Emily Holland, professeure adjointe à l’Institut des études maritimes russes du Collège naval de guerre des États-Unis, qui rappelle que l’Ukraine ne fait pas partie de l’Organisation du traité de l'Atlantique nordOTAN.
L’Alliance n’est donc pas tenue de venir à son secours, tandis que Taïwan est un partenaire de facto des États-Unis en matière de sécurité. L'Occident n'a jamais donné de garanties formelles de sécurité à l'Ukraine, alors que les États-Unis sont liés à Taïwan par le Taïwan Relations Act, souligne Mme Holland.