
Pourquoi il faut prendre les menaces nucléaires russes au sérieux
Métro
Alors que les violences se poursuivent en Ukraine, la tension augmente sur la scène internationale. Les sanctions économiques contre la Russie se multiplient, incluant le retrait de produits russes des étagères, et Vladimir Poutine brandit la menace nucléaire. Mais cette menace est-elle sérieuse?
ANALYSE – Dimanche soir, la présidence russe a franchi un cap stratégique : elle a annoncé qu’elle plaçait ses forces nucléaires en alerte. Les opinions européennes sont soit pétrifiées soit incrédules face à cette menace atomique. Assiste-t-on à un gigantesque coup de bluff ou à un changement majeur de l’approche russe, susceptible d’aboutir à cette perspective qui a longtemps paru inenvisageable qu’est l’emploi de l’arme nucléaire sur le sol européen ?
Ce qui est certain, c’est que cette escalade reflète deux tendances profondes de la vision militaire de Moscou : d’une part, la Russie rappelle au monde son statut de puissance nucléaire au moment où de multiples mesures – y compris militaires – sont prises par les Occidentaux pour soutenir l’Ukraine ; d’autre part, elle fait ainsi le constat des limites de sa puissance politique.
Incapable de se faire écouter des Occidentaux et impuissant à convaincre les Ukrainiens de se détourner de leur gouvernement et de se rallier au « grand frère » russe, le Kremlin se porte aux extrêmes en menaçant le continent du feu nucléaire. Loin d’être un signe de puissance, cette menace réitérée est l’aveu d’un échec politique irrémédiable – et cela, même si la Russie finit par obtenir une victoire militaire sur le terrain ukrainien en n’employant que les forces conventionnelles.
Lorsque, dimanche 27 février au soir, après quatre jours de combats en Ukraine, la présidence russe a explicitement annoncé la mise en alerte de ses unités nucléaires, elle a surpris l’Europe et inquiété le monde.
Elle avait pourtant déjà proféré cette menace, de façon à peine voilée, dès le début de l’« opération militaire spéciale », jeudi matin à l’aube, à la fin du message présidentiel qui tentait de justifier la guerre en invoquant le risque de « génocide » des russophones en Ukraine et le besoin (supposé) de « dénazifier » le pays.
En effet, la déclaration de guerre comportait, dans sa dernière phrase, une menace implicitement nucléaire contre les États qui tenteraient de s’opposer à l’intervention militaire russe. Vladimir Poutine l’avait formulée ainsi : quiconque s’opposerait à l’action russe en subirait des conséquences « inconnues dans votre histoire ».