Port du masque : questions pour un microbiologiste infectiologue
Radio-Canada
Jeudi, le directeur national de santé publique par intérim du Québec, le Dr Luc Boileau, a annoncé que le port du masque dans les lieux publics restera obligatoire jusqu'au 14 mai. La semaine prochaine, une levée de l'obligation pourrait cependant être recommandée par la suite. Dans la foulée de cette annonce, le Dr Alex Carignan, microbiologiste infectiologue à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l'Université de Sherbrooke, a répondu à des questions sur le masque et la COVID-19 sur les ondes de RDI.
C’est clair qu’il a été très utile. Au départ, au début de la pandémie, il y avait des réserves de plusieurs personnes, incluant dans le monde scientifique, mais maintenant, c’est très clair. Si je prends par exemple une étude en Californie, on parle d’une réduction de plus de 50, 60 % lorsqu’on porte un masque chirurgical, et on est autour de plus de 80 % lorsqu’on a le fameux masque N95.
Lorsqu’on parle du retrait éventuel du port du masque, on savait qu’on n’allait pas porter un masque pour le reste de nos jours. Il faut une fin. Je pense que la situation épidémiologique semble favorable. Lorsqu’on regarde le pic de la sixième vague, il est certainement derrière nous. On a passé le pic depuis plus de deux semaines [...] Les hospitalisations commencent aussi tranquillement à diminuer. Je pense qu'éventuellement, lorsqu’on parle à la mi-mai, si c’est le moment qui est choisi, vraisemblablement, ce sera raisonnable à ce moment-là de cesser le port du masque obligatoire.
Par contre, [...] je pense qu’il va falloir qu’il s’installe une attitude de respect dans la population, car le masque est maintenant un symbole de division. Les gens qui vont décider de continuer à le porter, car ils ont des comorbidités et qu’ils sont immunosupprimés, je pense qu’on va devoir respecter ça et accepter ça comme une nouvelle normalité.
On est encore dans une phase très active au Québec et dans le monde [...] Je vois tous les jours plusieurs cas de COVID, des cas encore aux soins intensifs, des cas hospitalisés, des gens qui sont très malades. C’est une maladie qui n’est pas simple à traiter. On a de nouveaux outils maintenant [...], mais ça demeure une maladie qui est sournoise, qui cause beaucoup de complications et de problèmes chez nos patients.
Une étude assez importante parue il y a quelques semaines dans le New England [Journal of Medicine] montrait que lorsqu’on avait fait une première infection et qu’on en faisait une deuxième, lors de la deuxième, on avait beaucoup moins de chances de complications, d’être hospitalisé et d’en décéder.
Au fur et à mesure où les gens font l’infection, où on installe la vaccination, on devrait s’attendre à ce que les complications diminuent au fil du temps, et c’est ce qu’on observe depuis le début de la pandémie. Il y a eu une diminution graduelle de la mortalité liée à plusieurs éléments, dont la vaccination, la réinfection et les divers outils de traitement.
Tout ça nous permet d’aspirer à une vie de plus en plus normale.
En termes d’efficacité de vaccination, quand on regarde les données québécoises, on voit un impact très important avec des réductions d’hospitalisation de 80 à 90 % pour les gens qui ont été vaccinés et qui ont reçu la dose de rappel. C’est clair que la vaccination a eu un impact majeur en termes de réduction des complications. Au niveau de l’infection, c’est vrai que c’est moindre. On aurait espéré peut-être un retour à la normale plus rapide grâce aux vaccins. Malheureusement, ça ne s’est pas concrétisé, mais quand même, même en termes de réduction des infections, la vaccination a un impact significatif.