Parce qu’il faut aussi s’occuper des petits doués
Radio-Canada
En quelques minutes à peine, Amédé Mercure, 10 ans, termine une longue série de problèmes mathématiques. Ses camarades de classe, eux, sont toujours penchés sur leur feuille à décortiquer les chiffres. Au lieu de patienter sur sa chaise, il rend son travail à son enseignante et quitte sa classe pour aller construire un robot. Incursion dans l'univers des enfants doués de l'école du Sacré-Coeur de Sherbrooke.
Il y a trois ans, cette école a mis en place un projet pilote pour accompagner les élèves qui ont un profil de douance, aussi appelé haut potentiel intellectuel. La douance, c'est une facilité à faire les choses comparées à d'autres élèves, explique Amédé, l'un des enfants suivis dans le cadre de ce projet.
Le critère objectif qu'on a pour l'identifier, c'est qu'à partir de tests standardisés d'évaluation du fonctionnement cognitif, des gens vont se situer vraiment à l'extrême supérieur de la distribution normale de la population. Elles sont situées dans le 98e, 99e percentile, explique la professeure en psychologie de l'Université de Sherbrooke, Anne Brault-Labbé.
Il n'y a pas que les capacités intellectuelles qui définissent la douance, rappelle Mme Brault-Labbé. Ça se manifeste aussi, par exemple, par une acquisition plus rapide de tout ce qui est des jalons d'apprentissage et développementaux, comme l'acquisition du langage, de la lecture, de la marche.
Si, à première vue, la douance peut sembler être une bénédiction pour les enfants, elle s'accompagne bien souvent de désavantages, notent les principaux intéressés. Moi, j'apprends plus vite, je comprends plus vite et je suis capable d'emmagasiner beaucoup d'informations en même temps. J'adore apprendre. Les profs répètent pour les autres élèves, et moi, je ne peux plus apprendre parce que je le sais déjà. J'ai beaucoup moins de plaisir à l'école à cause de ça, raconte Nalyane Lefebvre.
Anne Brault-Labbé rappelle que les enfants doués ont des besoins bien particuliers. On associe la douance à la réussite, premier de classe, c'est facile. C'est vrai, la douance, la plupart du temps, peut être une force chez la personne. Mais quand l'enfant évolue dans un environnement, dans un contexte qui n'est pas adapté à son style d'apprentissage, à qui il est comme personne et à sa manière de fonctionner, comme n'importe quel enfant qui a des besoins particuliers, ça devient plus difficile pour lui d'être bien.
De son propre aveu, Amédé était tannant en classe : il perdait son temps, achalait ses copains et parlait n'importe quand. Je faisais n'importe quoi!, raconte-t-il en riant.
« Ça peut amener une perte d'intérêt pour l'école, une incompréhension de ce que je fais ici. Qu'est-ce que ça me donner d'être a l'école? Ça peut amener une perte de motivation, une perte d'engagement. On peut s'inquiéter à ce moment-là de la persévérance scolaire. »
Si la douance, comme besoin particulier, a fait son entrée officiellement au ministère de l'Éducation en 2020, des enseignants de l'École du Sacré-Cœur ont vu bien avant que les enfants à haut potentiel avaient besoin d'aide. Il y a des élèves qui ont des besoins plus particuliers, comme en orthopédagogie. Mais il y a des élèves qui sont forts, sont plus que forts. On voyait des élèves, qui parfois, pouvaient se désorganiser, qui s'embêtaient, raconte l'enseignante Nathalie Letarte.