Ottawa n’a encore liquidé aucun actif russe
Radio-Canada
L’annonce avait été très remarquée en avril dernier : le Canada allait bientôt se donner le pouvoir de revendre des avoirs russes sous le coup de sanctions pour financer l’aide à l’Ukraine. Cinq mois plus tard, aucun actif n’a encore été liquidé et cette promesse pourrait encore mettre des mois à se matérialiser.
À la fin de juin, le gouvernement canadien s’est officiellement doté de nouveaux pouvoirs pour liquider des actifs russes saisis. Depuis, les résultats se font attendre, même si des dizaines de millions de dollars d’actifs ont été gelés au Canada. Je travaille très très fort pour mettre en œuvre cette législation, a assuré la ministre des Affaires étrangères lundi dernier.
Cependant, à Ottawa, les désirs de la ministre Mélanie Joly se heurtent aux réalités juridiques. Selon nos informations, les fonctionnaires cherchent toujours une manière d'appliquer cette politique de manière adéquate d’un point de vue légal. Cette évaluation pourrait prendre encore des mois.
Comment revendre des actifs russes tout en évitant des contestations judiciaires? Le Canada risque-t-il d’être condamné à verser des compensations aux mêmes personnes ou organisations qu’il souhaite sanctionner? Nous n’avons pas droit à l’erreur. Nous devons agir avec diligence, explique une source gouvernementale.
L’idée est belle sur le papier, mais l’appliquer est une autre paire de manches. Il faut bien comprendre que c'est une mesure inhabituelle. Aucun pays du G7 n'a fait ça jusqu'à présent, explique Frédéric Mégret, professeur à la Faculté de droit de l’Université McGill.
Le professeur Mégret explique que le Canada court le risque de se placer en contravention du droit international. Geler des biens est une chose, mais les liquider sans condamnation criminelle en est une autre, même si ce pouvoir est prévu dans la loi canadienne. Les sanctions ont un effet suspensif sur un droit de propriété. La liquidation, c'est une mesure beaucoup plus draconienne, fait-il valoir.
Le Canada pourrait s’exposer à des contestations judiciaires.
« L'État pourrait être tenu de payer des compensations aux personnes qui ont été expropriées de cette manière. C'est bien ça, le problème. »
Selon nos informations, le gouvernement Trudeau cherche désespérément un premier bien qui pourrait être saisi et liquidé afin de marquer les esprits.