
Ni traduction ni adaptation : la littérature québécoise fière de sa langue
Radio-Canada
Marginalisée pendant des années, la littérature québécoise s’épanouit enfin en France, dans sa langue, sans traduction ni « francisation », grâce au travail méticuleux d’éditeurs et d’éditrices de la France et du Québec.
On assiste à un vrai boom, s’enthousiasme Anne-Isabelle Tremblay, responsable de la Librairie du Québec à Paris. Propriété du gouvernement canadien, cette librairie promeut et diffuse, depuis plus de 25 ans, la littérature de la Belle Province.
Reste que, de mémoire de bibliothécaire, l’engouement actuel est nouveau : romans, essais, bandes dessinées... Les rayons des librairies débordent de cette littérature, à la fois si proche de l’Hexagone par sa langue, mais aussi si lointaine par son imaginaire nord-américain.
La dernière à avoir fait parler d’elle? L’autrice de bandes dessinées Julie Doucet, qui a récemment remporté le Grand Prix du Festival d'Angoulême, la plus prestigieuse récompense francophone dans le monde de la BD. Elle est la première Canadienne à y être consacrée.
À l’automne, un autre Québécois avait fait grand bruit : le romancier Kevin Lambert, finaliste du prix Médicis avec Tu aimeras ce que tu as tué. La Québécoise Marie-Ève Thuot avait été en lice pour ce même prix l’année précédente pour son roman La trajectoire des confettis. Elle a également été finaliste pour le prestigieux Prix de Flore.
Sans parler du prix Renaudot essai 2020, décerné à Dominique Fortier pour Les villes de papier, sur la poétesse américaine Emily Dickinson. Une consécration pour cette littérature, longtemps boudée par les prix littéraires français.
Car si des auteurs et autrices francophones du Maghreb ou d’Afrique subsaharienne reçoivent souvent des récompenses – Tahar Ben Jelloun, Goncourt 1987, Djaïli Amadou Amal, Goncourt des lycéens 2020, ou Mohamed Mbougar Sarr, Goncourt 2021 –, c’est loin d’être le cas pour les figures de la littérature québécoise.
Il y a toujours eu un peu de mépris vis-à-vis de cette littérature et de sa langue, assure Lola Nicolle, éditrice à la jeune maison d’édition Les Avrils. Avec Sandrine Thévenet, elle a publié au début du mois de mars deux textes de la féministe québécoise Martine Delvaux : Le monde est à toi et Pompières et pyromanes.
D’ailleurs, poursuit Lola Nicolle, pendant longtemps, on ne pensait pas traduire, mais corriger une langue alors jugée difficilement compréhensible par le lectorat français. Aujourd’hui, les choses changent parce que les éditeurs québécois sont de plus en plus revendicatifs, osent exiger plus. Plus question pour eux d’accepter qu’on anéantisse leur langue.