
Mouvement populaire en Haïti : une diaspora mitigée face au « Bwa kale »
Radio-Canada
Depuis plus d’une semaine, à Port-au-Prince, plusieurs membres de la population haïtienne se sont regroupés en tant que vigiles de quartier. Ils assurent la sécurité et exécutent de présumés adhérents de gangs armés. En Ontario, des personnes d’origine haïtienne expriment leur inquiétude face à ces mises à mort.
Le mouvement dénommé Bwa kale a pris naissance dans un quartier de la capitale haïtienne où de présumés bandits ont été lynchés et brûlés par une foule en colère. Plusieurs vidéos de ces scènes circulent sur les réseaux sociaux et alimentent les échanges.
Cela ne va pas résoudre la situation, affirme d’emblée Émilio François, un résident d’Oshawa, à l’ouest de Toronto. L’homme d’affaires a toutefois du mal à s’opposer aux réactions populaires. C’est difficile d’être pour ou contre parce que la population [haïtienne] est à bout de souffle, dit-il. Il réclame tout de même la fin de ces agitations. Il faut que l’État freine l’hémorragie de ce mouvement, renchérit-il.
Joël Étienne est d’origine haïtienne. Il sympathise aussi avec la population. Je suis de tout cœur avec elle, mais il est extrêmement difficile de savoir qui est bon ou mauvais, conçoit-il.
De son côté, l’ottavien Gaspard Dorélien est à la fois pour et contre ce mouvement. C’est une réponse adéquate du peuple par rapport à ce qu’il subit, croit-il. Cependant, j’ai vu des images d’une monstruosité insoutenable, dénonce-t-il.
« La police ne peut rien. Les gouvernements internationaux ne veulent pas nous aider. Le peuple n’a pas d’autre choix… Même si ces gangs étaient jugés et condamnés, on n’a pas la garantie qu’ils resteraient en prison. »
Émilio François rappelle que par le passé, des faits similaires se sont produits en Haïti. Quand Jean Claude Duvalier a perdu le pouvoir, le peuple s’est vengé contre les macoutes, évoque-t-il. Les tontons macoutes étaient la milice du régime des Duvaliers.
Ils en ont tué beaucoup et des innocents ont aussi perdu la vie, dit-il. C’est justement la condamnation d’innocents qui inquiète l'inquiète. Émilio François se réjouit toutefois que les cas de signalements de kidnappings soient presque inexistants depuis le soulèvement populaire des quartiers.
Il s’inquiète aussi des répercussions : Mon père a 86 ans, il ne peut pas courir. Si des bandits contre-attaquent dans les quartiers, il va mourir, craint-il.