Mère d’un jeune handicapé, une médecin devra quitter si Legault brandit le bâton
TVA Nouvelles
Forcer les médecins de famille à prendre en charge plus de patients pourrait provoquer une vague de départs à la retraite, alors que le quart des omnipraticiens ont 60 ans et plus. Si François Legault met sa menace à exécution, la Dre Sylvie Del Branco, mère d’un jeune handicapé, n’aura d’autre choix que de jeter l'éponge.
Le premier ministre a été catégorique mardi : son gouvernement déposera un projet de loi pour obliger certains médecins de famille à travailler plus. «Il y a une minorité de médecins qui ne joue pas le jeu, qui ne prend pas en charge assez de patients, donc on va agir», a-t-il dit.
Une stratégie qui forcera la Dre Del Branco à prendre une retraite anticipée, après 30 ans de loyaux services, laissant bien des patients orphelins.
En plus de ses heures en cabinet au GMF, cette toubib prend soins des détenus du pénitencier de Hull, travaille en clinique de réadaptation et œuvre auprès de clientèles ayant des problèmes de dépendances. Les besoins sont criants dans sa région de l’Outaouais.
«Mes services comme clinicienne, comme médecin, sont déjà dirigés vers des clientèles vulnérables et ça ne me tente pas de les abandonner pour aller me taper 400 patients de plus et délaisser une (clientèle en) marge de la société. C’est ça la réalité sur le terrain», lance l’omnipraticienne de 55 ans, qui a accepté de raconter son histoire même si sa profession est «dénigrée» par les politiciens.
Mais surtout, la docteure devra s’occuper davantage de son fils autiste qui n’aura bientôt plus de services puisqu’il arrive à l’âge adulte. Elle a d’ailleurs déjà commencé à transférer un peu plus de 300 de ses patients à des médecins plus jeunes en raison de cette réalité familiale. Il lui en reste 640 à l’heure actuelle.
«M. Legault veut qu’on ait plus de patients, (mais) cette réalité-là (familiale), elle ne disparait pas du portrait. On se divise en plusieurs morceaux, on donne un peu de temps ici et là, mais le temps que j’ai pour des patients en clinique, je n’en ai pas de temps pour 1000 patients!», insiste-t-elle.
Et si le gouvernement opte pour des mesures coercitives, Sylvie Del Branco quittera la profession. «Je mets la clef dans la porte et je prends ma retraite d’une façon que je ne voulais pas faire, car je ne voulais pas laisser mes patients sans médecin de famille».
La docteure se désole du manque de respect envers la médecine familiale et s’inquiète de l’impact sur les étudiants, qui boudent le domaine. Pourtant, la solution passe par plus de nouveaux omnipraticiens. «On se ramasse aujourd’hui avec une gang de vieux médecins qui sont proches de la retraite et pas de relève», souligne-t-elle. Uniquement dans son GMF, ses cinq autres collègues sont en âge de réduire leur pratique.