Les sales affaires d’Ericsson en Irak pendant l’ère de Daesh
Radio-Canada
Le géant des télécommunications Ericsson a demandé l’autorisation au groupe armé État islamique pour poursuivre ses activités en Irak et a payé pour le transport clandestin de ses équipements dans des zones contrôlées à l’époque par Daesh, selon une fuite de documents confidentiels obtenus par le Consortium international des journalistes d’enquête et partagés avec l’émission Enquête.
La fuite contient un rapport d’enquête interne d’Ericsson qui fait état de nombreux exemples de corruption, de pots-de-vin, de fraude, de détournements de fonds et de blanchiment d’argent par des employés de la multinationale suédoise et par certains de ses sous-traitants en Irak entre 2011 et 2019.
Le rapport de 79 pages a été rédigé par le département de la conformité d’Ericsson, qui est responsable de surveiller les activités de la multinationale. On y mentionne des paiements douteux de plusieurs dizaines de millions de dollars, y compris des voyages gratuits pour des responsables du ministère de la Défense de l’Irak.
Présente en Irak depuis la chute du régime de Saddam Hussein, Ericsson y brasse des affaires importantes. Selon le rapport confidentiel, ses ventes ont atteint 1,9 milliard de dollars entre 2011 et 2018.
L’Irak est un des pays les plus corrompus au monde et, selon le professeur de relations internationales Miloud Chennoufi du Collège des forces canadiennes, la multinationale suédoise devait savoir dans quoi elle s’embarquait.
Vous savez très bien que vous allez vous adonner à des pratiques qui sont au bord de la légalité et, bien entendu, au bord de l’illégalité, dit-il.
Mais la situation s’est corsée pour Ericsson lorsque le groupe armé État islamique a capturé la ville de Mossoul en juin 2014 et a déclaré l’instauration d’un califat.
Ericsson était en plein projet de déploiement d’équipement de téléphonie 3G, mais ses employés déployés sur le terrain avaient désormais peur de sortir.
Selon le rapport interne, des employés ont fortement suggéré de suspendre les activités d’Eriksson en Irak en invoquant un cas de force majeure. Mais, en dépit des risques accrus, la direction d’Ericsson au Moyen-Orient a choisi de poursuivre ses activités.