Les femmes, grandes oubliées des funérailles nationales québécoises
Radio-Canada
Le sexisme s'insinue partout, même dans la mort. Parmi la vingtaine de personnalités marquantes qui ont eu droit à la reconnaissance ultime de l'État québécois après leur décès, on ne compte aucune femme en dehors du monde politique.
Que ce soit en arts visuels, au cinéma, en littérature, dans le domaine du sport, dans le milieu syndical, dans le monde des médias ou dans tout autre secteur, aucune femme ne s'est jamais distinguée suffisamment aux yeux du gouvernement du Québec pour mériter les plus grands honneurs, des funérailles nationales, après avoir rendu l'âme.
Le portrait paraît bien différent lorsqu'il s'agit d'un homme, surtout s'il savait manier un bâton de hockey.
Mardi, Guy Lafleur sera le troisième joueur de hockey à recevoir le privilège de faire partie du club sélect des personnalités qui auront eu droit à des funérailles nationales après Jean Béliveau (en 2014) et Maurice Richard (en 2000), preuve éloquente de la valeur toute particulière accordée à ce sport au Québec.
Jeudi dernier, le premier ministre François Legault a tenu à assister aux funérailles d'un autre joueur de hockey, Mike Bossy, et a demandé que le drapeau du Québec soit mis en berne à l'Assemblée nationale.
À la liste des personnalités honorées et associées au monde du hockey, il faut ajouter le nom du journaliste et commentateur de La soirée du hockey Richard Garneau, qui a fait l'objet d'une commémoration nationale en 2013.
Le choix d'offrir des funérailles nationales à la famille du disparu relève du premier ministre. Il s'agit donc d'une décision politique, arbitraire, qui ne repose sur aucun critère objectif. En plus des réalisations du défunt, on peut présumer que cette décision repose aussi en grande partie sur la notoriété de la personnalité ou sur une appréciation subjective de sa contribution au rayonnement du Québec. Le premier ministre peut également s'appuyer sur une recommandation du chef du protocole.
Depuis 1959, au total, une trentaine de personnes ont eu des funérailles officielles au Québec, dont une dizaine qui ont reçu la récompense ultime, des funérailles d'État, et une vingtaine de personnalités à qui on a offert des funérailles nationales ou des commémorations nationales, c'est-à-dire la version laïque.
Aucune femme n'a eu des funérailles d'État, normalement réservées aux premiers ministres ou aux présidents de l'Assemblée nationale. Des exceptions à cette règle ont quand même été faites pour deux ministres : l'ex-ministre libéral Gérard-D. Levesque, en 1993, et l'ex-ministre Pierre Laporte, assassiné en 1970 pendant la crise d'Octobre.