Les erreurs commises par Emmanuel Macron pendant les législatives
TVA Nouvelles
Campagne ratée, usage systématique de la carte de la peur des «extrêmes»: les erreurs tactiques commises par Emmanuel Macron et son camp aux législatives, combinées à l'usure du pouvoir, lui coûtent la majorité parlementaire et le forcent à un remaniement gouvernemental délicat.
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Bien loin de la figure du tacticien de 2017 qui avait réussi à se faire élire en siphonnant gauche et droite modérée par le centre, Emmanuel Macron, usé par cinq ans de pouvoir et le sentiment de défiance que sa politique a inspirés à certains électeurs, a commis plusieurs erreurs tactiques, selon des spécialistes.
D'abord, il a organisé le scrutin trop tard pour pleinement exploiter la dynamique de sa réélection le 24 avril: «une campagne de sept semaines, ce n'était pas du tout raisonnable, on sait qu'on perd alors entre 15 et 20 députés par semaine quand on est au gouvernement», explique à l'AFP Étienne Ollion, sociologue et chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS).
Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, diagnostique également «une perte d'autorité qui repose sur une erreur stratégique: avoir fixé très loin du second tour de l'élection présidentielle les élections législatives».
Par ailleurs, largement accaparé par la guerre en Ukraine, il ne s'est guère impliqué dans la campagne. Sur les cinq jours de campagne active entre les deux tours, il en a passé trois à l'étranger.
En occupant le centre politique et agitant la menace de la montée des extrêmes s'il n'avait pas de majorité, il a subi un «retour de flamme», selon Gilles Ivaldi, chargé de recherche au CNRS et au Centre de recherches politiques de Sciences Po à Paris (Cevipof).
«Avec sa stratégie d'occuper l'espace central et le vote de rejet contre sa politique, il a laissé s'engouffrer la Nupes à gauche et le RN à droite», a analysé le chercheur sur la radio Franceinfo, en référence à la coalition de gauche Nupes (Nouvelle union popuplaire, écologique et sociale) et au Rassemblement national (RN, extrême droite), les deux grandes forces d'opposition dans la nouvelle Assemblée.
«Démonstration est faite que le jeu dangereux qu'il a mené avec les partis extrémistes conduisait à une impasse», conclut dans un éditorial lundi le quotidien L'Opinion, en référence aux appels successifs du chef de l'État à la mobilisation contre les «extrêmes», visant le RN à la présidentielle en avril, et la Nupes aux législatives en juin.