Les effets de la tragédie de Lac-Mégantic sur l’environnement continuent à inquiéter
Radio-Canada
En plus de représenter un drame humain, l’explosion survenue à Lac-Mégantic a eu des conséquences sur l’environnement. Au total, 100 000 litres de pétrole ont été déversés en quelques heures dans la rivière Chaudière en juillet 2013. Une décennie après la tragédie ferroviaire, une équipe du ministère de l’Environnement sera déployée sur le terrain cet été pour étudier comment la faune et la flore du secteur se remettent des événements. Si Québec s’attend à ce que les résultats soient rassurants, des inquiétudes persistent chez des citoyens.
Les traces du désastre ne sont presque plus visibles dans les milieux naturels entourant les lieux du déraillement. Les opérations de nettoyage effectuées après la catastrophe et les crues des printemps qui se sont succédé semblent avoir permis à la vie de reprendre ses droits dans la rivière.
Il y a eu un bon lessivage, un bon nettoyage. Donc, les endroits où il pourrait rester quelque chose, c’est là où c’est plus profond, où il y a des fosses ou des sédiments qui peuvent rester dans le fond de l’eau, explique le professeur en chimie environnementale à l’Université de Montréal, Sébastien Sauvé.
Selon cet expert, le retrait de tous les sols contaminés a permis d'éviter que le déversement demeure un problème de santé publique. Les sols auraient agi comme réservoirs de PFAS [substances perfluoroalkyliques et polyfluoroalkyliques appelés contaminants éternels] et d’hydrocarbures. Le moindrement qu’il y aurait eu de la pluie, les eaux n’auraient pas été bien captées, ça aurait pu contribuer à rajouter une contamination dans l’environnement, dans la rivière. Mais en enlevant la source, il n’y a plus eu de nouvelles contaminations, précise-t-il.
Des inquiétudes persistent tout de même dans la communauté. Le vice-président de l’Association chasse et pêche Lac-Mégantic, Pierre Grenier, dit observer des bouleversements dans les populations de poissons depuis 2013, dont une baisse de la reproduction.
« Ce qui est vraiment alarmant, c’est la population. Il n’y a plus de poissons. [...] C’est dû à quoi? Est-ce que c’est dû à la tragédie? Est-ce que c’est dû à un manque d’ensemencement? Est-ce que ce sont les frayères qui ne fonctionnent plus? Est-ce que c’est dû aux barrages? »
De son côté, le ministère de l’Environnement a constaté un taux de malformation anormalement élevé des poissons dans le secteur, entre 2014 et 2016.
Les produits liés au pétrole ne sont pas bioaccumulables, comme le mercure. [...] Ils ne s’accumulent pas dans les poissons. La théorie, c’est que le pétrole présent dans les sédiments peut attaquer le mucus qui est sur le poisson, et quand ce mucus-là est altéré, les nageoires des poissons [...] deviennent exposées aux bactéries, et il peut y avoir de l’érosion, explique le biologiste au ministère de l’Environnement du Québec, David Berryman. Il ajoute que c’est l’effet qui avait été le plus observé chez les spécimens examinés, il y a quelques années.
Une équipe reviendra dans les prochaines semaines pour prendre des échantillons et voir si la situation s’est améliorée. On a laissé passer quelques années, comme le conseillait le comité expert sur la rivière Chaudière, et là, on retourne prendre des échantillons pour faire l’état des lieux sur trois volets, souligne-t-il.