
La transformation d’Hochelaga dans la lentille de Joannie Lafrenière
Radio-Canada
« C’est l’humain qui fait le cœur d’un quartier. » Avec l’exposition Hochelaga : Montréal en mutation, la photographe et documentariste Joannie Lafrenière nous amène à la rencontre de résidentes et résidents d’Hochelaga, sur lesquels elle porte un regard empli de tendresse et d’empathie. Ses clichés et ses vidéos seront en vitrine au Musée McCord Stewart, à Montréal, du 31 mars au 10 septembre.
Il y a Renaud, le réparateur de vélo, Mme Grandchamp, la locataire esseulée, ou encore Pierre-André, le fleuriste qui vient de troquer les fleurs de la ville pour celles de la campagne : à chacun de ces personnages, Joannie Lafrenière consacre une petite pièce thématique unique.
Ces cubicules, qui sont tous différents les uns des autres, hébergent des photos, des vidéos, des enregistrements audio ou encore des accessoires en tout genre, à l’instar du grand vase empli de cheveux pour illustrer le travail de Michel le barbier.
À travers ce parcours non linéaire qui rappelle une balade dans Hochelaga, on ressent le lien de proximité qu’entretient Joannie Lafrenière avec ses voisins et voisines, elle qui habite le quartier historiquement ouvrier depuis près de 20 ans. La photographe y a élu domicile dans la jeune vingtaine après avoir grandi en campagne, heureuse d’y retrouver les discussions de balcon qui ont jalonné son enfance.
Ma rencontre avec Hochelaga a été presque aussi puissante que celle avec la photographie. Une relation passionnelle, mais qui se termine bien, je pense, a-t-elle déclaré, en riant, lors d’une visite de presse de l’exposition, mardi.
Certaines des personnes présentées dans l’exposition Hochelaga : Montréal en mutation avaient d’abord été révélées au public dans le court métrage de Joannie Lafrenière Hochelaga, mon amour, en 2011, preuve de la fidélité de l’artiste envers ses sujets, qui sont aussi des amis et amies.
Ainsi, lorsqu’on retrouve Claude, qui a longtemps habité un conteneur près d'un chemin de fer, on découvre le portrait délicat, sans voyeurisme, d’un homme au regard perçant. Un enregistrement crève-cœur, laissé sur la boîte vocale de l’artiste, annonce sa disparition, et donc la fin d’une époque, quelque part près de la rue Ontario.
Puis, quand nous sortons de la pièce, nos yeux se posent immanquablement sur un poème écrit sur un mur, et qui semble soudainement prendre tout son sens : Le deuil : du regard et du lieu. Rien de tout cela ne se souviendra de nous.
Ce sont les mots du poète Benoit Bordeleau, lui aussi amoureux du quartier Hochelaga. Ses vers accompagnent les gens tout au long de leur visite, glissés ici et là entre les portraits et les vidéos. Ces agencements d’ambiances, de sonorités et de textures sont le fruit d’une riche collaboration entre la photographe et le scénographe Pierre-Étienne Locas.