
La servante écarlate : un ballet qui veut faire réfléchir
Radio-Canada
La première fois que le Royal Winnipeg Ballet (RWB) a présenté sa mouture de La Servante écarlate, inspirée du roman dystopique de Margaret Atwood, c’était en 2013. Depuis, la réalité a dangereusement emboîté le pas à la fiction, souligne André Lewis, directeur artistique et général du RWB, qui a décidé de remettre l'œuvre au programme de la plus ancienne compagnie de ballet du Canada.
Aujourd’hui, je pense que [La servante écarlate] est encore plus [d’actualité]. [...] Dans toute société que nous avons, que nous créons, les choses peuvent changer pour le pire, facilement. Et il faut vraiment penser que la démocratie n’est pas donnée, commente le danseur, enseignant et gestionnaire originaire de Gatineau, de passage à Ottawa pour présenter La servante écarlate au Centre national des arts d’Ottawa les 27, 28 et 29 octobre.
Le roman de Margaret Atwood a été publié en 1985. Et la dernière représentation de la production du RWB à Ottawa remonte à 2015, année marquant les 30 ans de La servante écarlate. À l’époque, Barack Obama était président des États-Unis, Donald Trump n’avait pas encore été élu... et le renversement de l’arrêt Roe contre Wade était encore un objectif pour les militants anti-avortement.
Dans toute société, il y a toujours des risques, poursuit André Lewis, y compris dans les démocraties.
Même s’il est muet, le récit dansé de La servante écarlate est facile à suivre, garantit M. Lewis : il met en scène le personnage de Defred (ou Offred, en version originale), réduite à un rôle d’esclave reproductrice, dans l’univers ultraconservateur de la république de Gilead qui a remplacé la démocratie aux États-Unis.
Le spectacle porte la signature de Lila York, chorégraphe new-yorkaise active dans le milieu de la danse depuis cinq décennies. C’est elle qui a approché le RWB, ajoute M. Lewis, des années avant que Hulu transforme le roman en série télévisuelle.
C’est d’ailleurs le ballet qui a influencé la série – et non l’inverse, précise M. Lewis.
« Les [producteurs] de télévision qui ont fait la série sont venus à Winnipeg pour voir le ballet. [...] Je ne sais pas exactement ce qu’ils en ont pensé, mais quand j’ai vu la série, certaines des couleurs et [certains éléments] esthétiques étaient les mêmes que les nôtres. »
Quant à Margaret Atwood, elle a aimé le produit final, assure André Lewis. Au point de donner son feu vert une troisième fois à ce spectacle qui renaît après deux cycles en 2013 et en 2018.