La résistance aux antibiotiques voyage dans les nuages
Radio-Canada
Une équipe de chercheurs de l’Université Laval et de l’Université de Clermont Auvergne a évalué pour la première fois la concentration de gènes d'antibiorésistance bactérienne dans les nuages. Leur étude fait la démonstration que les bactéries et ces gènes peuvent se propager par la voie de l'atmosphère.
L’équipe a publié les résultats de son étude dans le journal scientifique (Nouvelle fenêtre), Science of the Total Environment. L’atmosphère c’est un vecteur de transport de matériaux biologiques à large échelle. C’est quelque chose qui on présume a existé depuis tout le temps, d’autant plus que la résistance aux antibiotiques ce n’est pas nouveau non plus, rappelle l’auteur principal de l’étude, Florent Rossi qui est chercheur postdoctoral à l'Université Laval.
Ces gènes ne présentent pas un danger directement, mais certains d’entre eux ont le potentiel d’être acquis par d’autres bactéries qui croisent leur chemin. C'est notamment le cas lorsque qu'ils sont sous la forme de plasmides, des petits fragments circulaires de matériel génétique que les bactéries peuvent s'échanger entre elles.
Ces gènes portés par des plasmides peuvent être transférés d’une bactérie à l’autre et celle qui va le récupérer, va elle-aussi devenir résistante à l’antibiotique en question, précise Florent Rossi.
Il n'en demeure pas moins que les nuages ne sont probablement pas les plus grandes sources d'échange de matériel génétique bactérien. Les concentrations de bactéries observées dans l’air et dans les nuages sont très inférieures aux concentrations qu’on pourrait avoir plus près de la surface et dans d’autres écosystèmes, rassure-t-il.
Pour en arriver à leurs conclusions, l’équipe de chercheurs a échantillonné les nuages à différents moments, pendant deux ans. Elle a récolté ses échantillons à l’aide de deux techniques différentes, l’une pour les bactéries entières et l’autre le matériel génétique et les acides aminés.
Des impacteurs à nuages, développés par l’équipe de l’Université de Clermont Auvergne, permettent de récupérer les gouttelettes d’eau sur des lames de métal. On peut faire nos analyses directement sur ces eaux. L’appareil nous permet d’aller regarder le contenu physico-chimique de l’eau et c’est à partir de là qu’on mesure la concentration de bactéries, explique Florent Rossi.
Des impingers à haut débit sont aussi utilisés, ce sont des genres de gros aspirateurs à nuages qui peuvent recueillir les fragments d’ADN et ARN bactériens, formés de chaînes d’acides aminés. Ces échantillons permettent d’analyser la présence des gènes de résistance aux antibiotiques.
À travers leurs échantillonnages, les chercheurs ont remarqué des variations de concentration de bactéries et de gènes. Le contenu en bactérie du nuage et donc de la masse d’air va être affecté par son historique, en fonction des surfaces au-dessus desquelles elle a transité, elle sera plus ou moins influencée par les émissions, explique le chercheur postdoctoral.