La pleine conscience, une arme contre les traumatismes et le régime iranien
Radio-Canada
Pour surmonter leurs traumatismes, de plus en plus d’Iraniens se tournent vers la pleine conscience et la méditation. Des pratiques condamnées par le régime iranien et qui témoignent du vide spirituel engendré par le schisme grandissant entre la théocratie des ayatollahs et les aspirations du peuple iranien, selon des experts.
Dans la grande salle adjacente à la cuisine de la pâtisserie iranienne Miraas Café & Pastry, située à Vaughan, au nord de Toronto, une soixantaine de femmes sont assises sur leurs tapis de yoga. La pièce est tellement pleine que plusieurs doivent s'asseoir sur des chaises adossées aux murs.
Quelques sanglots percent le silence. Une femme penche la tête vers l’avant et éponge ses larmes avec un mouchoir.
Nous avons traversé une révolution, une guerre, des souffrances, le processus d’immigration et maintenant que nous sommes témoins de ce qu’il se passe [en Iran], nous devons pratiquer l’amour propre, prendre soin de nous, parce que personne d’autre le fera pour nous, dit Bibi Rosa, qui guide la séance de pleine conscience d’une voix douce, à ses élèves.
La mort de Mahsa Amini, le mois dernier, et la vague de manifestations qui s'en est suivi ont réveillé de profonds traumatismes chez les Iraniens de la diaspora. Le besoin de se rassembler est plus important que jamais pour la communauté, explique Bibi Rosa.
« Les gens peuvent ainsi se rendre compte qu’ils ressentent la même colère, la même honte de ne pas être là-bas, le même malheur, que tout le monde a de la difficulté à dormir »
Le spécialiste du Moyen-Orient au Centre d’études et de recherches internationales de l'Université de Montréal, Vahid Yücesoy, lui-même d’origine iranienne, abonde dans le même sens.
Les Iraniens ont tenté de changer leur sort à plusieurs reprises pour malheureusement se buter à plusieurs embûches. [...] Chaque fois qu'il y a des échecs, ça crée des traumatismes, ça crée des déceptions, ça crée des situations insupportables, dit-il.
« C'est un régime qui pénètre dans toutes les sphères de la vie. [...] Ça a créé une sorte de dépression, de traumatisme qui affecte beaucoup les Iraniens, même à l'exil. »