La longue lutte pour les expropriés de Mirabel
Radio-Canada
Il y a 15 ans, le 18 décembre 2006, Ottawa annonçait la rétrocession complète de 11 000 acres de terre aux agriculteurs de Mirabel, expropriés en 1969 pour construire l'aéroport. Au fil des ans, nos journalistes sont allés à la rencontre de ces familles dépossédées de leurs terres et ont pu témoigner de leur souffrance.
Après avoir analysé 20 lieux dédiés, le gouvernement fédéral annonce, le 27 mars 1969, que le nouvel aéroport de Montréal s'installera sur le site du village de Sainte-Scholastique. Au total, 40 000 hectares, parmi les terres agricoles les plus riches du Québec, seront expropriés. La nouvelle touche 3126 familles et 14 municipalités de la région des Basses-Laurentides.
La suite, nous la connaissons. L’aéroport de Mirabel n’a jamais connu le succès escompté.
Lors de l’inauguration, Pierre Elliott Trudeau prédisait un achalandage de 10 millions de visiteurs par an pour les années 1980 et de 40 millions pour les années 2000. Le nombre de passagers n’a jamais dépassé les 2,5 millions par année, et l’aéroport est vite devenu un éléphant blanc.
Le choc pétrolier des années 1970 et la popularité grandissante de l’aéroport Lester B. Pearson de Toronto ont eu raison de l’aérogare, qui fut démolie en 2014.
Dans un reportage de l’émission Format 60 du 17 juillet 1970, la journaliste Denise Bombardier consulte le plan d’expropriation en compagnie de Denis Boissy, directeur du centre d’information pour le gouvernement fédéral. Afin de donner un ordre de grandeur, le responsable indique que la surface totale expropriée équivaut aux « deux tiers de l’île de Montréal ».
Il explique ensuite que les citoyens dont la résidence est située à l’extérieur de l’aéroport, mais à l’intérieur de la zone expropriée, deviendront locataires du gouvernement. C’est que le gouvernement fédéral avait à l’époque acheté dix fois la superficie nécessaire en vue d’un éventuel agrandissement.
La journaliste rencontre ensuite des citoyens chassés de leur propriété. Plusieurs n’ont pas de plan établi pour le futur. Derrière leur air résigné, l’inquiétude est facile à déceler. La plupart n’ont toujours pas d'informations sur le montant qui leur sera alloué ni sur le moment où ils devront quitter leurs terres, plus d’un an après l’annonce.
« Certainement que ça inquiète, parce que tant qu’on n’est pas payés, on ne sait pas comment on va s’arranger. Et puis, ce n’est pas nous qui avons demandé à partir. On a été avertis depuis le 27 mars 1969 et puis là on attend, et j’espère que ça va aller pour le mieux. »