La France et ses partenaires européens se retirent militairement du Mali
Radio-Canada
Poussés dehors par les « obstructions » de la junte au pouvoir à Bamako, la France et ses partenaires européens ont officialisé jeudi leur retrait militaire du Mali au terme de neuf ans de lutte antidjihadiste menée par Paris, tout en affirmant vouloir rester engagés auprès des pays sahéliens et du golfe de Guinée.
En raison des multiples obstructions des autorités de transition maliennes, le Canada et les états européens opérant aux côtés de l'opération (française) Barkhane et au sein de la Task Force Takuba estiment que les conditions ne sont plus réunies pour poursuivre efficacement leur engagement militaire actuel (...) au Mali et ont donc décidé d'entamer le retrait coordonné du territoire malien de leurs moyens militaires respectifs dédiés à ces opérations, soulignent-ils dans une déclaration commune.
Nous ne pouvons pas rester engagés militairement aux côtés d'autorités de fait dont nous ne partageons ni la stratégie ni les objectifs cachés, et qui ont recours à « des mercenaires de la société (russe) Wagner » aux ambitions prédatrices, a fait valoir le président français Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse aux côtés des présidents sénégalais, ghanéen et du Conseil européen. Les autorités maliennes continuent de nier la présence de ces mercenaires sur leur territoire.
Paris et ses partenaires souhaitent toutefois rester engagés dans la région sahélienne et étendre leur soutien aux pays voisins du golfe de Guinée et d'Afrique de l'Ouest pour contenir la menace djihadiste. Les paramètres de cette réorganisation seront arrêtés d'ici juin 2022, selon la déclaration commune.
Nous comprenons cette décision, a déclaré le président sénégalais Macky Sall dans une conférence de presse commune avec le président Emmanuel Macron. La lutte contre le terrorisme au Sahel ne saurait être la seule affaire des pays africains [...]. Nous sommes heureux que l'engagement ait été renouvelé de rester dans la région et de réarticuler le dispositif, a-t-il ajouté, alors que le départ français risque potentiellement d'ouvrir des perspectives aux djihadistes.
Le Sahel et le golfe de Guinée sont des priorités de la stratégie d'expansion des organisations djihadistes Al-Qaïda et État islamique, a souligné Emmanuel Macron.
La France est militairement présente depuis 2013 au Mali, proie des groupes djihadistes qui sévissent aussi dans d'autres États sahéliens. Paris est intervenu pour enrayer la progression des groupes islamistes radicaux menaçant Bamako et a ensuite mis sur pied une vaste opération régionale, Barkhane, déployant des milliers de soldats pour lutter contre les franchises locales d'Al-Qaïda et du groupe armé État islamique.
Mais malgré des victoires tactiques, le terrain n'a jamais été véritablement repris par l'État malien et ses forces armées.
Facteur aggravant, le gouvernement malien a été renversé lors d'un double coup d'État en 2020 et en 2021, aboutissant à l'arrivée au pouvoir d'une junte qui refuse d'organiser des élections avant plusieurs années et qui surfe sur un sentiment antifrançais croissant dans la région.