
La cuvée 2021 des auteurs d’ici
Radio-Canada
Ils sont peut-être passés sous votre radar cette année, mais de nombreux auteurs bas-laurentiens ont fait paraître des ouvrages en 2021. Voici quelques-uns de leurs livres, à lire sans modération ou à offrir à vos proches, histoire de se changer les idées pendant ce temps des Fêtes qui sera, encore cette année, particulier.
Une adolescente fugue avec son premier amour, file sur cette route de la Gaspésie du nord, avec la cadence des villages étendus dans chaque baie. Elle y découvre la liberté, les autres, avant de revenir chez elle, à Matane, pour repartir à nouveau, cette fois vers les vraies villes, les grandes, celles qui sont à l’Ouest, où elle restera pendant des années. Toutefois, le temps passe et la force à revenir, à redécouvrir d’anciens amours, mais surtout, à se redécouvrir, elle. À l’instar de son premier livre, Tout doit partir, on ouvre L’état de nos routes comme un écrin. Johanne Fournier nous fait ainsi toucher aux histoires souterraines et à ce quelque chose sur le bord de la disparition qu’il faut s’empresser d’attraper avant qu’il ne file.
Avec Chambres d'échos, Paul-Chanel Malenfant nous emmène encore une fois dans l'intime, à la lisière de la parole et du silence, du passé et du présent, dans la seconde perpétuelle d'une éternité. Les chambres qu'il évoque sont témoins des découvertes de l'enfance, de la sexualité, des mots qui forment le poème qui recommence le monde. On y découvre aussi un adulte qui regarde sa vie dans un rétroviseur, qui cherche, encore et toujours, l'instant présent, malgré tous ceux qui sont disparus. L'auteur nous offre ainsi un moment de répit, dans l'espace et le temps inconnus de la poésie.
Que restera-t-il de notre passé? C’est l’une des questions que se pose l’auteure rimouskoise Marie-Hélène Voyer, alors que les lieux qui racontent ce passé disparaissent du paysage québécois contemporain à coups d’abandons et de démolitions. Dans cet essai qui plaira à coup sûr aux amoureux d’histoire et de patrimoine, l’auteure se met au service de ces lieux humbles qui murmurent le temps. Elle y parle aussi bien des églises en décrépitude, des villages disparus dans les années 70 que des bâtisseurs de vide qui s’emploient à réduire notre passé à une anecdote en rasant des bâtiments qui racontent notre histoire pour en refaire du neuf. Elle se questionne surtout sur la façon dont nous pourrions mieux faire le lien entre notre passé et notre présent.
Le terrain de baseball, l'appartement, le restaurant. Les femmes que j'aime ne font pas de bicyclette nous emporte en ces lieux simples, habités par des personnages qui vivent leur quotidien auquel on assiste, avec l'impression de regarder par le trou d'une serrure. Tantôt une femme regarde dehors, assise à la table d'un café, tantôt des enfants font des chasses à l'homme à bord de leur BMX, tantôt un homme écrit un poème sur un formulaire pour enjoliver la vie d'une préposée au renouvellement des cartes d'assurance-maladie. Sous la plume d'Anthony Lacroix, ces petits moments simples sont mis en lumière et ont souvent beaucoup à révéler.
Pourquoi couper des arbres pour écrire un mauvais livre sur l'écologie? Dès le début de son livre, Fred Dubé donne le ton. S'il tire à boulets rouges sur les Costco et Walmart de ce monde, les vedettes, les politiciens et les riches oligarques, il n'hésite pas à se critiquer lui-même. La crise n'est pas environnementale, elle est humaine. C'est ce mammifère prétentieux qu'il faut aider, ou chasser, écrit-il. Alors que se poursuit le mythe du capitalisme vert, Fred Dubé montre du doigt les contradictions de notre société. Il cite aussi bien Gaston Miron, Alain Deneault que Marie-Chantal Toupin dans un essai qui fait réfléchir et rire, mais qui, disons-le, nous laisse un peu découragés face à notre époque.
Un étrange Général qui contrôle tout un village, des requins-scies et un jeune homme tout droit sorti du centre jeunesse qui revient pour déterrer les morts. Voilà quelques curiosités que l’on retrouve dans Noir Métal, qui a été en lice cet automne pour les Prix du gouverneur général. Sébastien Chabot nous y convie à une sorte de messe noire où le passé se superpose au présent et où des parents blasés n’hésitent pas à offrir leurs enfants comme monnaie d’échange. Tout ça, dans un paysage en crise cardiaque où s'égrène le temps comme les villages de la Matapédia, le long de la route 132.
Un incendie se déclare dans la maison de Charles Amand, mal-aimé du village de Saint-Jean-Port-Joli. Le feu est-il d'origine criminelle? Est-il dû aux expériences étranges menées par M. Amand, à sa négligence, ou à rien de moins qu'à l'œuvre du diable? M. T. L. B. enquête. Dans son dernier livre, Claude La Charité imagine ainsi une suite à L'influence d'un livre, de Philippe-Aubert de Gaspé fils, en faisant cohabiter à la fois son auteur et son personnage, mais aussi toute une bibliothèque de livres qui ont influencé la littérature québécoise et que l'auteur, également professeur de littérature à l'Université du Québec à Rimouski, invite à (re)découvrir.
Le bédéiste Jean-Sébastien Bérubé n'est plus à présenter. Après nous avoir transportés en Asie dans Comment je ne suis pas devenu moine, il propose à nouveau un ouvrage très personnel, qui relate les aléas vécus par un jeune aspirant bédéiste qui s'apprête à passer sa ceinture noire en karaté tout en faisant face à ses tempêtes intérieures. Les gens de la région y reconnaîtront plusieurs lieux de Rimouski, tandis que les amateurs d'arts martiaux pourront y admirer la finesse du coup de crayon de Jean-Sébastien Bérubé, qui réussit habilement à mettre du mouvement dans ses dessins pour nous faire voir les combats.