La Cour d’appel se penche sur le port du voile à l’Assemblée nationale
Radio-Canada
Les procureurs du gouvernement Legault se sont attaqués, jeudi en Cour d'appel, à la portion du jugement de première instance qui a invalidé l'interdiction de siéger à visage couvert à l'Assemblée nationale contenue dans la loi 21 sur la laïcité.
Le juge Marc-André Blanchard estimait dans sa décision que cette interdiction portait atteinte au droit garanti par la Charte canadienne de se présenter dans une élection fédérale ou provinciale.
Le magistrat avait appuyé son raisonnement sur le fait que ce droit échappe à la disposition de dérogation dont s'est servi le gouvernement pour suspendre la liberté de religion afin d'interdire le port de signes religieux chez certaines personnes en position d'autorité.
S'exprimant au nom du Procureur général du Québec, Me Isabelle Brunet a d'abord reproché au juge Blanchard de s'être prononcé de manière théorique, puisqu'aucune preuve ne lui avait été présentée selon laquelle une personne n'aurait pu briguer les suffrages à visage couvert. Une question constitutionnelle ne doit pas être tranchée dans un vide factuel, a-t-elle avancé.
Mais surtout, a-t-elle poursuivi, la loi 21 n'empêche personne à visage couvert de se présenter et de se faire élire. C'est au moment de siéger qu'elle devra se découvrir le visage.
Au-delà du visage découvert, un député n'est pas empêché de porter son signe religieux en Chambre à moins d'être nommé président ou vice-président ou ministre de la Justice, ce qui représente un privilège et non un droit, a-t-elle fait valoir.
Prenant la parole derrière elle, Me Christian Trépanier est venu s'exprimer au nom de l'ex-président de l'Assemblée nationale, François Paradis, pour rappeler que la Cour suprême a déjà tranché sur l'existence d'une compétence exclusive et absolue du Parlement sur certaines activités, dont le contrôle qu'exercent les Chambres sur les travaux ou les débats du Parlement.
« C'est au Parlement et non aux tribunaux qu'il revient [...] d'imposer le retrait d'un visage couvert ou le port d'un signe religieux pour le président ou le vice-président. »
Dans un cas comme celui-ci, a-t-il plaidé, le Parlement est le juge de l'opportunité des modalités de son exercice qui échappe à tout contrôle judiciaire, une affirmation qui a soulevé plusieurs questionnements des trois juges sur le banc de la Cour d'appel.