L’inflation alimentée par les gouvernements et par la Banque du Canada?
Radio-Canada
Non seulement la Banque du Canada a été trop lente à réagir face à l’inflation, mais les décisions gouvernementales, mues par des visées électoralistes, pourraient alimenter encore davantage la hausse du coût de la vie. On peut se demander si les choix des autorités politiques et monétaires ont contribué à accentuer l’inflation.
Certains sont d’avis que la Banque du Canada est en partie responsable de la poussée inflationniste actuelle. Oui, tout à fait, c’est clair, a répondu sans hésitation Jean-François Perrault, économiste en chef de la Banque Scotia, à l'émission Zone économie jeudi soir. Il y a eu un mauvais diagnostic de l’inflation dans les mois précédents. C’est vrai pour la Banque du Canada et c’est vrai pour d’autres banques centrales, a-t-il soutenu.
Ce mauvais diagnostic a donc exacerbé les attentes inflationnistes de la population. Non seulement l’inflation est forte, mais les projections du public nourrissent l’inflation.
Le gros responsable, actuellement, c’est la Banque du Canada, c’est la Réserve fédérale, a dit l’économiste et sénateur Clément Gignac mercredi soir à Zone économie. Il partage l’avis de Jean-François Perrault : Ils ont trop tardé à augmenter les taux d’intérêt. Ce n’est pas perdu, il est encore temps de récupérer, mais il faudra se mettre en branle de façon plus musclée, plus vite, pour contrer les attentes inflationnistes.
Il faut agir vite, dit M, Gignac, avec des hausses marquées de 50 points de base, peut-être même de 75 points de base, dès la prochaine réunion des dirigeants de la Banque du Canada, le 1er juin. Les économistes tendent à favoriser des hausses rapides pour juguler l’inflation et pour éviter une récession, comme l’ancien président de la Réserve fédérale américaine Alan Greenspan l’avait fait dans les années 1990.
Il est rare de voir de telles critiques à l’endroit d’un dirigeant de banque centrale. Bien sûr, le grand patron de la Réserve fédérale américaine, Jerome Powell, a été attaqué à maintes reprises par le président Donald Trump parce qu’il avait poursuivi une politique de hausses du taux directeur. Les réprimandes de l'ex-président des États-Unis étaient farfelues dans les faits et animées par des intérêts de nature politique qui n’avaient rien à voir avec les faits économiques.
Aujourd’hui, les critiques envers le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, sont bien plus sérieuses et viennent de sources crédibles. Comme Jean-François Perrault l’a expliqué, le gouverneur a commis une erreur l’automne dernier en continuant à considérer l’inflation comme un phénomène transitoire alors que, déjà, son homologue aux États-Unis avait commencé à changer de discours.
Alors que la Banque du Canada s’apprête à appuyer sur l’accélérateur dans sa hausse de taux, il devient par ailleurs urgent pour les gouvernements de mieux cibler leurs interventions. À l’approche de nouvelles élections au Québec et en Ontario, il est tentant de distribuer des chèques à tout le monde. Cependant, quand on fait cela, on alimente l’inflation.
Il faut cibler les soutiens aux personnes qui ont vraiment besoin d’aide : les locataires, les personnes à faible revenu, les aînés qui ont besoin du supplément de revenu garanti et les personnes monoparentales qui doivent composer avec de lourdes charges, par exemple.