
L’inévitable invasion de l’Ukraine
Radio-Canada
L’invasion de l’Ukraine par la Russie de Vladimir Poutine, qui a commencé ce jeudi matin à l’aube, était inévitable après le discours inouï, d’une violence verbale sans précédent, qu’il avait prononcé le 21 février.
Le programme était tout écrit. Dans ce discours, il niait le droit à l’existence d’un État ukrainien indépendant, accusait le monde entier – des bolchéviques aux impérialistes américains, en passant par d’imaginaires néonazis ukrainiens au pouvoir à Kiev, en train de perpétrer rien de moins qu’un génocide – d’avoir créé et soutenu un État fantoche.
Cet État fantoche qui ne représente rien et n’a aucune base historique, il s’agit maintenant pour l’armée russe de le rayer de la carte.
La démonstration d’agressivité de Vladimir Poutine s’est poursuivie dans la déclaration diffusée à Moscou ce jeudi 24 février au matin. Selon les analystes de métadonnées et les observations visuelles sur la vidéo elle-même, ce dernier message semble avoir été enregistré lundi, en même temps que l’autre.
Tout était prêt depuis longtemps pour que les quelque 200 000 soldats massés simultanément sur trois fronts passent à l’action, à la suite d’une crise fabriquée de toutes pièces à partir du printemps 2021. Ces blindés, ces avions et ces bateaux n’étaient donc pas dépêchés simplement pour faire des exercices, du théâtre et de l’intimidation. Ils étaient là pour servir.
Poutine a déclaré que cette opération militaire spéciale vise la démilitarisation et la dénazification de l'Ukraine. Référence à l'affirmation ubuesque selon laquelle c’est en réalité l'armée ukrainienne qui menace la Russie, et non le contraire.
Une armée qui serait dirigée par des néonazis, en train d’exterminer physiquement les russophones d’Ukraine (on cherche les morts et les charniers).
Dans cette logique, l’invasion russe ne serait donc qu’un acte d’autodéfense, voire un acte de paix, qui ne vise pas à occuper le pays, mais à le démilitariser. D’où l’appel à déposer les armes sans opposer de résistance et – promesse de Vladimir – tous les militaires de l'armée ukrainienne qui obéissent pourront quitter la zone de combat.
Ce double langage annonce sans doute, au contraire de ce qui est explicitement affirmé, des combats furieux et une volonté d’occupation. Le degré de préparation et la capacité de résistance de l’armée et de la société ukrainienne restent pour l’instant une grande inconnue de cette guerre qui commence.