L’australopithèque Mme Ples, cette cousine sud-africaine de Lucy
Radio-Canada
La célèbre australopithèque Lucy, découverte en Éthiopie, avait une cousine contemporaine vivant à quelques milliers de kilomètres en Afrique australe, il y a environ 3,5 millions d'années, selon une étude qui invite à considérer le « berceau de l'humanité » sur l'ensemble du continent africain.
Une nouvelle datation d'une grotte de Sterkfontein en Afrique du Sud, au nord-ouest de Johannesburg, a donné un coup de vieux, d'un million d'années, aux fossiles d'Australopithecus africanus, l'une des espèces d'australopithèques, ces prédécesseurs du genre humain.
Parmi eux, le fossile de Mme Ples, un des premiers crânes complets de ce genre d'homininés, découvert en 1947 sur ce site truffé de grottes de calcite, qui a livré plusieurs milliers de fossiles, dont 500 d'australopithèques. Il est inscrit par l'UNESCO au patrimoine mondial sous le nom de Berceau de l'humanité.
La zone abritant Mme Ples avait été précédemment datée entre 2,1 et 2,6 millions d'années, d'après l'âge des sédiments tombés dans la grotte après sa formation. Mais chronologiquement, ça ne collait pas, se souvient Laurent Bruxelles, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) de France, l'un des auteurs de l'étude parue cette semaine dans la revue PNAS.
C'était bizarre de voir perdurer des australopithèques aussi longtemps, explique ce géologue à l'AFP. À 2,2 millions d'années, Homo habilis (premier représentant du genre homo) avait déjà fait son apparition dans la région. Or, nulle trace de lui ni de ses outils à ce niveau-là de la grotte.
Autre fait troublant : l'emblématique squelette de Little Foot, un australopithèque encore plus ancien trouvé au plus profond de la grotte, et que de récentes recherches venaient de dater de 3,67 millions d'années... L'écart temporel avec sa petite sœur Mme Ples était trop grand au regard de l'épaisseur des couches sédimentaires les séparant.
Avec le paléontologue sud-africain Ronald Clarke, auteur principal de l'étude, Laurent Bruxelles décide d'utiliser la même méthode de datation que celle de Little Foot. Les fossiles d'australopithèques étant trop anciens pour pouvoir être datés directement au carbone 14, on ne peut dater que les sédiments dans lesquels ils sont pris.
La datation par isotopes cosmogéniques (les rayons cosmiques qui bombardent la Terre) permet de faire dans la dentelle géologique, en reconstituant au plus près l'histoire de la grotte, qui s'est remplie au fil du temps comme un sablier.
Comme pour Little Foot, les analyses ont montré que les roches de la grotte avaient été enterrées avec les fossiles il y a 3,4 à 3,6 millions d'années. Et que les sédiments intrusifs – la couche de calcite qui avait donné lieu à la datation initiale – s'étaient mis en place un million d'années plus tard.