Inflation et hausse du taux directeur : à quoi les Canadiens doivent-ils s’attendre?
Radio-Canada
La Banque du Canada a augmenté son taux directeur d’un demi-point de pourcentage cette semaine, le faisant passer de 0,5 à 1 %. Il s’agissait de la première hausse d’une telle ampleur en plus de 20 ans et les Canadiens devront s’y faire, affirment certains spécialistes.
L’économie peut supporter des taux d’intérêt plus élevés et elle en a besoin, a noté le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem.
Le plus haut responsable de la politique monétaire au pays s’inquiète de la généralisation des pressions sur les prix au Canada, alimentée entre autres par la guerre en Ukraine. Et pour cause : le pouvoir d’achat des Canadiens est frappé de plein fouet. Le rythme annuel de l’inflation s’élevait à 5,7 % en février. Le prix du panier d’épicerie à lui seul a augmenté de 7,4 %. Le prix de l’essence a bondi de 48 % en un an.
C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre l’augmentation du taux directeur et celles à venir, car l’objectif de la Banque est de maintenir l’inflation à 2 %. En augmentant son taux directeur, elle envoie un signal aux institutions financières de majorer leurs taux d’intérêts, ce qui décourage les emprunts et les dépenses.
Supposons une hypothèque de 500 000 $ sur 25 ans avec taux fixe, une hausse de 50 points de base implique une hausse mensuelle du paiement hypothécaire de 125 $, illustre le professeur d’économie à l’Université d’Ottawa Serge Coulombe, invité à l'émission Les faits d'abord. Ça, c’est pour la hausse de 50 points de base. Mais on doit s’attendre à ce que la hausse dans le courant de l’année soit d’au moins 2 points de pourcentage, ce qui implique une hausse des paiements hypothécaires de 500 dollars.
C’est une ponction importante dans le budget de ménages qui ont emprunté pour s’acheter une maison récemment, souvent à des prix très élevés, ajoute-t-il, notant que la majorité des hypothèques contractées par les premiers acheteurs sont d’au moins 500 000 $, le prix moyen d'une maison au Canada étant nettement supérieur.
Pour l’économiste, cet exemple illustre toute la difficulté de contrer les pressions inflationnistes. C’est difficile de lutter contre l’inflation et d'être populaire parce que ça implique de resserrer les conditions de crédit pour les ménages et les entreprises. C’est pour ça que l'on ne confie pas cette tâche aux politiciens qui doivent être réélus .
Et ces pressions inflationnistes ne sont pas près de s’estomper. Sylvain Charlebois, professeur en distribution et politiques agroalimentaires à l’Université Dalhousie, s’attend à voir l’abordabilité alimentaire devenir un enjeu de taille au cours de la prochaine année.
L’expert souligne qu’historiquement, le taux d’inflation alimentaire canadien, évalué à 7,4 % en février, finit toujours par rattraper celui du voisin américain, actuellement de 8,8 %. Les choses se corsent de plus en plus [...] on s’attend à ce que le taux d’inflation alimentaire dépasse même le 9 % au cours des prochains mois. Ce sera difficile pour les ménages qui n’ont pas nécessairement les moyens d’absorber ce genre de hausse.