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Des CHSLD avaient averti Québec de l’« hécatombe » à venir, dès mars 2020
Radio-Canada
« Je vous prie d'agir maintenant, de grâce. » Dès la mi-mars 2020, un mois avant le drame du CHSLD Herron, des gestionnaires de CHSLD avaient tiré la sonnette d'alarme sur la « catastrophe » à venir, en s'adressant à de hauts fonctionnaires du ministère de la Santé du Québec. C'est ce qu'on découvre dans des courriels déposés en preuve dans le cadre de l'enquête de la coroner sur les décès du printemps 2020.
Comme un mauvais présage, les représentants de milieux de vie pour aînés évoquaient tous les problèmes que le rapport de la protectrice du citoyen a plus tard identifiés comme responsables de la crise : les transferts de patients des hôpitaux vers les CHSLDCentre d'hébergement et de soins de longue durée, les déplacements de personnel et les ruptures de services en raison du manque d'employés.
Ces courriels révèlent par ailleurs que des CHSLD manquaient urgemment d'équipements de protection, au moment même où le premier ministre François Legault affirmait à la télévision que les stocks se portaient bien.
Le 12 mars 2020, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) prévient les 59 CHSLD privés conventionnés de se préparer à l'arrivée de la COVID-19. Lors de la conférence téléphonique, une haute fonctionnaire explique que les CISSSCentre intégré de santé et de services sociaux et les CIUSSSCentre intégré universitaire de santé et de services sociaux leur fourniront les équipements de protection individuelle (EPI), puisqu'ils ont la responsabilité des établissements de leur territoire.
Mais pas le moindre masque, gant ou jaquette n'est livré.
Quatre jours plus tard, le 16 mars, la directrice de l'Association des établissements privés conventionnés (AEPC), Annick Lavoie, s’en désole auprès de la sous-ministre adjointe responsable des Aînés, Natalie Rosebush. Cette dernière lui promet de faire le message. Sauf que rien ne change.
Le 19 mars, Annick Lavoie met en copie le cabinet de la ministre des Aînés, Marguerite Blais. Plusieurs CHSLD se trouvent à ce moment-là en situation précaire et critique, explique-t-elle.
Certains CISSS et CIUSSS contactés refusent d'approvisionner, alors que nous faisons partie du réseau de la santé, rappelle Annick Lavoie. Elle exhorte le ministère à aider ses CHSLD pour éviter le pire.
« Nul besoin de rappeler le scénario catastrophe advenant un cas de COVID-19 dans un CHSLD. »