Des étoiles filantes au féminisme pop
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Sandrine Galand vient de publier Le Féminisme pop, un essai remarquable issu de sa thèse qui explore ce féminisme aux multiples facettes. Rencontre.
J’étais au doctorat lorsqu’il y a eu un retour du mot «féminisme». Dans les décennies 1980 et 1990, on pouvait être féministes, mais sans jamais le revendiquer ou même le dire. C’est le cas de la chanteuse Pink, notamment. Et, soudainement, c’était la question qu’on posait aux stars. Soit elles l’adoptaient, soit elles le récusaient. Ça m’a d’abord intéressée en tant que citoyenne en formation féministe. Ma thèse, je l’ai ensuite construite à rebours, de fil en aiguille. J’ai toujours voulu écrire avec les gens qui, comme moi, ne savent pas quoi faire de ces amours-là pour des objets culturels en contradiction avec nos valeurs. Les exemples dans mon livre sont en fait moins importants que le phénomène lui-même.
Je pense que oui! Nous avons bénéficié de la dispersion de personnages féminins principaux dans la culture populaire. Même s’ils étaient problématiques, effectivement, nous, on en faisait ce qu’on voulait. Les Spice Girls étaient décriées parce qu’elles étaient hypersexualisées, instrumentalisées parce que le groupe avait été créé par un homme pour faire vendre, etc., mais du côté de l’approche des fans, elles nous donnaient le droit d’être. Agir pour les jeunes filles et les jeunes hommes qui les aiment comme des modèles, c’est un peu ce que continuent de faire les féministes pop d’aujourd’hui. La militante et écrivaine Janet Mock dit à ce propos que de voir Beyoncé exister dans l’espace public lui donne le droit de voir son propre corps exister.
Lena Dunham est particulière, car elle est polarisante, autant du côté des féministes que des non-féministes. Elle a quand même présenté dans une série très populaire – la sienne, Girls – un corps féminin comme on n’en voyait pas encore, ou en tout cas pas de cette manière-là. Les choix de l’habillement de son personnage, Hannah, étaient volontairement «non flatteurs». De plus, non seulement la série représentait une amitié au féminin moins idéalisée que dans des séries sœurs, et ça fait du bien, mais que Lena Dunham expose son corps à l’écran me donnait le droit de voir mon propre corps exister. Encore maintenant, elle continue d’ailleurs de parler de son corps grâce aux réseaux sociaux.