Derrière le débat sur le serment au roi
Radio-Canada
Depuis des jours déjà, on discute du serment d’allégeance à Sa Majesté le roi. Le Parti québécois est-il bien avisé de remettre cette question à l’avant-plan ? Paul St-Pierre Plamondon remportera-t-il son pari de pouvoir siéger sans avoir porté allégeance ? La chose sera-t-elle jugée anticonstitutionnelle ?
Si on ne peut douter du désir sincère du chef péquiste de mettre fin à cette pratique ancienne, le débat qui fait rage aura surtout servi à lui donner de la visibilité. Paul St-Pierre Plamondon a choisi de pousser l’Assemblée nationale dans ses derniers retranchements, ce qui ne peut qu’exciter juristes et politologues.
Il est vrai que le moment est particulièrement bien choisi ; au lendemain des élections, chefs et députés rentrent habituellement dans leurs terres, le temps de méditer sur le sort que les électeurs leur ont réservé. Le chef péquiste, lui, occupe l’espace laissé vacant. La mort de la reine Élisabeth II lui a aussi offert une occasion qu’il n’a pas tardé à saisir.
Après avoir envoyé la balle dans la cour du secrétaire général de l’Assemblée nationale, qui la lui a renvoyée, Paul St-Pierre Plamondon place maintenant son destin entre les mains des chefs des autres formations politiques. Il leur demande d’adopter une motion pour lui permettre de siéger comme si de rien n'était, mais il les met, ce faisant, dans une position délicate eux aussi.
Ayant fait inscrire dans son Nouveau projet pour les nationalistes du Québec l’abolition de la fonction de lieutenant-gouverneur – qui, rappelons-le, n’est nul autre que le représentant du roi au Québec –, la CAQ aura du mal à refuser à Paul St-Pierre Plamondon si petite concession.
C’est que le gouvernement a lui-même inclus dans son projet de réforme parlementaire – encore à l’étude – le caractère facultatif du serment au roi. Si la CAQ maintient qu’elle veut toujours changer les règles, le message de Paul St-Pierre Plamondon à l’intention de François Legault n’en est pas moins limpide : son nationalisme sera mis à l’épreuve durant le mandat qui s’amorce.
Le cas de Québec solidaire est encore plus intéressant. En 2018, les dix députés de la formation politique ne voulaient pas prêter serment à la Couronne britannique. Ils s’étaient toutefois résolus à le faire en privé, après s’être laissé dire par le secrétaire général qu’ils ne pourraient siéger autrement.
Le député Sol Zanetti avait été particulièrement affecté par la prestation de ce serment, déclarant, dans les mois suivants, s’en être senti souillé à jamais. Il avait déposé un projet de loi, mort au feuilleton, pour que plus aucun député ne soit soumis à ce rituel de soumission idéologique.
Les députés de Québec solidaire oseront-ils cette fois-ci défier ouvertement l’Assemblée nationale ou abandonneront-ils ce terrain politique à leur homologue péquiste ? Dans tous les cas, ils devront plonger les premiers ; leur assermentation aura lieu mercredi, tandis que celle des députés du Parti québécois est prévue vendredi.