Culture et citoyenneté québécoise: un spectacle à saveur électoraliste
TVA Nouvelles
Dimanche après-midi, le ministre Roberge a annoncé les grandes orientations du nouveau programme qui remplacera Éthique et culture religieuse (ECR) et qui s’appellera dorénavant Culture et citoyenneté québécoise (CCQ).
Avant d’émettre nos souhaits pour la suite, qui demeure encore inconnue, nous ne pouvons passer sous silence le côté spectacle de l’exercice. Pourquoi a-t-on invité des personnalités publiques et en quoi est-ce pertinent? Nous comprenons parfaitement qu’elles venaient défendre de justes et nobles causes, causes que nous soutenons aussi, bien évidemment. Mais cela servait-il le domaine de l’éducation, ou plutôt les visées électoralistes de la CAQ? Où étaient les spécialistes de l’éducation et les experts responsables du contenu du nouveau programme? Nous aurions aimé voir et entendre les personnes qui rédigent le contenu de CCQ pour connaître, justement, leur expertise.
Nous nous devons également de souligner un certain mépris affiché à l'égard du programme actuel qui s’est incarné notamment par des faussetés lors de cette conférence de presse: non, tout n’a jamais été acceptable en classe au nom de quelconque dogme religieux - cela est d’ailleurs clairement mentionné dans le programme. Non, ECR ne limitait pas l’identité des élèves à leur seule appartenance religieuse! Non, ce n’était pas un programme qui avait des tabous! Non, ECR ne véhiculait pas de préjugés et des stéréotypes! Il était très insultant d’entendre le ministre lui-même dire de telles aberrations.
De plus, nous avons été profondément choqués et choquées de la présentation biaisée du programme actuel de la part du ministre de l’Éducation. En effet, l’entièreté des objectifs de l’axe éthique, dialogue et pensée critique est presque un copié-collé de la compétence éthique existante en ECR! Aussi, sur quelles études probantes, sur quelles analyses rigoureuses reposent l’ensemble de ces affirmations erronées ? Pourquoi ne pas rappeler qu’il est déjà demandé dans le programme d’ECR de promouvoir les valeurs de la société québécoise et de développer un esprit de discernement par rapport au phénomène religieux ?
Par ailleurs, la disparition de la compétence axée sur la culture religieuse n’est pas une surprise, mais elle reste désolante. En effet, les conséquences de l’inculture religieuse sont connues, et c’est pour cela que les instances internationales comme le Conseil de l’Europe et l’UNESCO recommandent l’éducation au fait religieux, notamment pour favoriser le vivre-ensemble, avoir des clés de compréhension du monde dans lequel nous vivons sans oublier son apport dans la lutte et la prévention contrer la radicalisation violente.
Enfin, il aurait été également apprécié que le ministre prenne le temps de rassurer les étudiantes et les étudiants qui se forment présentement en enseignement de l’ECR en les assurant de sa volonté d’établir une collaboration étroite avec les universités.
Ceci dit, nous considérons que ce qui est annoncé dans cette refonte est tout de même prometteur en ce qu’il maintient tout de même, comme nous l’écrivions, des éléments de continuité pertinents du programme d’ECR. Nous savons distinguer le jeu politique qui instrumentalise ECR à des fins électoralistes du cours CCQ lui-même. Mais, puisque nous ne connaissons pas encore les éléments de contenu ni leur répartition par cycle, nous souhaitons ici mettre de l’avant des principes fondamentaux qui, nous l’espérons ardemment, seront au cœur de CCQ et qui étaient déjà au fondement du cours d’ECR. D’abord, nous insistons sur l’importance de demeurer dans une démarche de réflexion éthique et non dans une approche moralisatrice et conscientisante. L’écueil est réel avec des sujets comme ceux liés à l’éducation à la sexualité ou l’environnement. D’ailleurs, en parlant de dilemmes moraux et non de questions éthiques comme le fait le ministre, nous pouvons nous interroger sur la manière dont seront définies les indications pédagogiques de ces thèmes.
De plus, nous souhaitons que les exigences d’impartialité et d’objectivité liées à la posture professionnelle de l’enseignant.e, qui sont des acquis majeurs apparues avec ÉCR, demeurent.