Crise du logement : des agriculteurs craignent un « troc » de leurs terres
Radio-Canada
Les Producteurs de grains du Québec s'inquiètent de ce que le gouvernement Legault se lance dans un exercice d'équilibriste entre protection du territoire agricole et réponse à la crise du logement. En entrevue avec Radio-Canada, leur président lance une mise en garde alors que s'amorce une grande consultation visant à réformer le régime de protection de la zone agricole.
Notre jardin n'est pas grand et on a besoin de chacun de ses morceaux pour assurer une production agricole qui est intéressante, dit Christian Overbeek. Au Québec, les terres agricoles cultivées représentent 2 % du territoire, alors qu'en Ontario, c'est 3,6 %, et que la moyenne canadienne est de 6,9 %.
Lors d'une conférence de presse organisée le 21 juin pour lancer une série de consultations, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, André Lamontagne, est apparu aux côtés de la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, et de représentants des maires qui subissent la pression de construire des logements et de développer leur territoire.
« C'est quand même inquiétant que, dans la même journée, vous ayez le ministre Lamontagne qui dit que c'est important de protéger la ressource [les terres], puis il y a quelqu'un d'autre, au sein du même gouvernement, qui dit : "Ça serait le fun si on pouvait construire des maisons et toutes sortes de choses". »
M. Overbeek dit comprendre les besoins des municipalités, mais en échange, je récupère où, les superficies que je perds en zone périurbaine? [...] Ça va être quoi, le troc? Ça va être quoi, l'échange?
Une fois une zone urbanisée, on ne peut plus revenir en arrière pour faire de l'agriculture, rappelle-t-il.
Le président des Producteurs de grains appelle les autorités à utiliser en priorité les superficies disponibles pour la construction en dehors de la zone agricole. Il y a sûrement des façons de faire pour mieux maximiser les espaces, dit-il en évoquant la densification.
Parmi les 9500 producteurs de grains du Québec, environ 30 % sont locataires et 70 % sont propriétaires de leurs terres. Christian Overbeek s'inquiète du nombre croissant de spéculateurs qui accaparent le territoire agricole sans être eux-mêmes agriculteurs.
Certains propriétaires non agriculteurs vont jusqu'à laisser la terre en friche, sans la louer, dans l'espoir d'obtenir un dézonage pour la construction de lotissements. C'est « triste » que de belles terres ne soient pas en production, dit M. Overbeek, c'est un « gaspillage », selon lui, d'une ressource qui contribuerait à une meilleure autonomie alimentaire au Québec.