Adieux déchirants à la frontière polono-ukrainienne
Radio-Canada
GRUSHIV, Ukraine - Dans la foule silencieuse, à quelques mètres du poste frontalier de Hrushiv-Budomezh, une grand-mère de 58 ans, larmes aux yeux et vêtue de gris, vocifère des insultes contre les Russes. Valentina souhaite qu’ils périssent en enfer pour les horreurs qu’ils infligent à son pays.
Je me souviens de ma grand-mère qui nous répétait sans cesse qu’elle avait été déplacée pendant la Deuxième Guerre mondiale, explique-t-elle. L’histoire se répète et c’est à mon tour de fuir la maison pour amener mes petits-enfants loin du danger.
Elle se sent isolée de sa famille, dont plusieurs membres vivent en Russie. Ils la traitent de conspirationniste lorsqu’elle leur envoie des photos des bombardements de Kharkiv et de Kherson, des villes à quelques centaines de kilomètres d'où elle habitait, à Zaporijia.
Mon fils qui vit en Pologne m’a appelée en pleurant hier et il m’a implorée de partir avec les enfants sur-le-champ. C’est devenu trop dangereux.
La file d’autocars venus de partout en Ukraine s’allonge sur quelques kilomètres. Des soldats arpentent la route, mitraillettes en bandoulière et mains posées sur leur arme. L’odeur de feu de camp embaume l’air. Des bénévoles cuisinent de la soupe et préparent du thé pour les réfugiés qui avancent par petits groupes jusqu’à la frontière.
Une autre grand-mère, Nadia, marche d’un pas décidé. La soixantenaire vient de faire 15 heures de train. Un voyage de Peltawa, près de Kharkiv, jusqu’à Lviv, qu’elle a passé étendue par terre dans le wagon bondé avec ses deux petites-filles de quatre et huit ans.
Mon fils m’attend de l’autre côté de la frontière, en Pologne, dit-elle, je vais lui confier ses filles. Moi, je retournerai immédiatement à la maison. Au diable le danger et les horreurs. C’est chez moi. C’est là que je veux vivre, pas dans un pays étranger.
« Les Russes ne me feront pas fuir. »
Les réfugiés qui atteignent la frontière sont tous passés par Lviv, joyau touristique de l’Europe de l’Est. La ville datant du Moyen Âge s’est imposée comme cité refuge dans l’ouest de l’Ukraine et comme plaque tournante pour l’aide humanitaire et le transport des réfugiés.