Et si la Russie coupait le gaz à l’Europe?
Radio-Canada
Au moins 40 % de l’approvisionnement énergétique européen provient de la Russie. Avec la montée des tensions autour de l’Ukraine, le président russe, Vladimir Poutine, pourrait-il être tenté de fermer les valves de ses gazoducs?
Réponses de Catherine Locatelli, chargée de recherche au Le Centre national de la recherche scientifique, rattachée à l'Université de Grenoble, spécialiste des industries pétrolières et gazières de la Russie, et de Jack Sharples, chercheur au programme sur le gaz à l’Oxford Institute for Energy Studies, en Grande-Bretagne.
C’est improbable, estime Jack Sharples. Les Européens ont des contrats à long terme avec la société russe Gazprom pour la fourniture de gaz. Les taxes que rapporte cette exportation représentent entre 5 % et 6 % du budget fédéral de l’État russe, qui a donc une bonne raison économique de ne pas interrompre l'approvisionnement européen.
Il y a quatre grandes voies d'approvisionnement :
En cas d’interruption, Gazprom, entreprise privée contrôlée par l’État, subirait des dommages considérables. En plus de perdre d’importants revenus, le géant gazier ferait face à de possibles poursuites de ses clients lésés. De plus, sa réputation serait entachée et ses partenaires pourraient hésiter, dorénavant, à signer des contrats avec elle. Les dommages causés à Gazprom seraient pires que ceux causés au gouvernement russe lui-même, croit M. Sharples.
Les exportations gazières vers l’Union européenneUE sont une source de devises fondamentale pour Moscou, rappelle Catherine Locatelli. L’Europe est son seul vrai marché d’exportation. La Russie tente bien de vendre son gaz à l’Asie, mais les échanges sont négligeables au regard des exportations vers l’Europe.
Les Européens importent environ 85 % du gaz qu’ils consomment et la Russie est leur principal fournisseur. S’il y avait une vraie guerre à laquelle participeraient les Occidentaux, les marchés réagiraient à l’incertitude et les prix du gaz augmenteraient, souligne Jack Sharples.
« Toute interruption, toute réduction de ce flux, même partielle, aurait un impact très fort sur l'équilibre entre l’offre et la demande du marché européen, et ferait bondir les prix. »
La situation est déjà tendue et le prix du gaz est au plus haut, explique M. Sharples. Il y a donc peu de marge de manœuvre.