17 ans pour traduire la Bible en mohawk
Radio-Canada
En cette journée radieuse, le soleil brille de mille feux sur Kanesatake. Installé confortablement à l’intérieur de son gazebo, Harvey Satewas Gabriel affiche un large sourire.
L’aîné mohawk savoure son thé glacé. Entre deux petites gorgées, il se confie sur l’un de ses grands projets de vie : traduire la Bible dans sa langue maternelle.
Cela m’a pris 17 ans et je peux vous dire qu’aujourd’hui je suis fier, non pas d’avoir traduit la Bible en mohawk, mais de posséder le savoir d’une langue aussi riche et singulière qui a traversé les siècles et les millénaires, déclare en entrevue Harvey Satewas Gabriel.
L’aîné de 83 ans s’exprime couramment en mohawk (kanien'kéha). C’est la langue de mes ancêtres, indique-t-il, précisant que durant sa jeunesse, c’était le seul idiome autorisé à l’intérieur du foyer.
Mon papa appartenait au clan de la Tortue et ma maman appartenait au clan de l'Ours. Quand ma mère est revenue du pensionnat et qu’elle s’est mariée, elle s’est juré que ses enfants n’auraient pas l’anglais comme langue maternelle.
Harvey Satewas Gabriel fait partie de l’Église unie du Canada, une branche protestante du christianisme très présente au pays. Depuis des générations, sa famille est d’ailleurs très engagée dans les activités religieuses. Notons qu’en 1864, son arrière-grand-père Sose Joseph Onasakenrat a traduit les quatre Évangiles en mohawk.
L’Église a ouvert ses bras depuis longtemps à notre communauté, dit l'aîné. Cela remonte au début du XIXe siècle avec John Norton (Teyoninhokarawen), qui a été le premier Autochtone à traduire une partie de la Bible en mohawk.
Il se souvient que durant son enfance, au début des années 1950, son oncle officiait à l’église de Kanesatake à Oka. Ce dernier se chargeait de traduire à voix haute des passages de la Bible. Il a plus tard rejoint le courant pentecôtiste.
Après son départ et pendant très longtemps, personne n’a lu le mohawk à l’église, se désole-t-il. J’étais vraiment triste pour les aînés qui venaient écouter les discours du révérend sans comprendre un mot de ce qui était dit durant le culte. Le pasteur ne parlait pas le mohawk et les aînés ne comprenaient pas l’anglais.