«Le tribunal populaire»: Geneviève Pettersen lance un appel au calme
TVA Nouvelles
La justice des réseaux sociaux, Geneviève Pettersen y a vertement goûté lorsqu’elle a tenu des propos controversés à l’égard d’une influenceuse. Sa mauvaise expérience lui a inspiré une réflexion sur la culture de l’annulation sur le web. Dans son documentaire Le tribunal populaire, Pettersen s’interroge: «À quoi et à qui ça sert, de canceller quelqu’un? Que reste-t-il, après?»
En novembre 2020, l’animatrice de QUB radio et chroniqueuse au Journal de Montréal avait commenté en ondes, avec Benoît Dutrizac, la dénonciation de l’influenceuse Elisabeth Rioux, qui avait publiquement déclaré avoir été victime de violence conjugale de la part de son conjoint. Mais l’échange s’est étiré, et les deux interlocuteurs avaient un peu dévié du sujet principal.
«Son gros "feature", à Elisabeth, c’est son fessier, son popotin», avait entre autres lancé Geneviève Pettersen, avant de réitérer son propos quelques heures plus tard à LCN.
«Je suis tombée dans le piège de l’information-spectacle», confesse aujourd’hui cette dernière à la caméra de son documentaire Le tribunal populaire, avouant au passage n’avoir jamais été capable de réécouter ces segments par la suite.
Bien sûr, au creux de la tempête, condamnée de toutes parts par internautes et observateurs de l’actualité («Je recevais des centaines de messages de haine par jour», confie-t-elle) l’autrice de La déesse des mouches à feu a craint de perdre ses contrats, de disparaître de la «mappe». D’être cancellée, comme on le dit maintenant familièrement. Elle avait l’impression que le monde entier lui en voulait. De là a émergé son questionnement sur la toxicité actuelle de l’espace public.
«À qui sert cette culture-là? Est-ce que les gens qui se font canceller entament vraiment une réflexion? Changent-ils? Doivent-ils "payer" encore après avoir été cancellés? Est-ce que les personnes qui cancellent trouvent un certain réconfort ou une réparation? Quelle est la place du pardon, dans tout ça? J’avais beaucoup de questions, sans prétention de trouver des réponses, mais je voulais amener sur la place publique une réflexion sur les effets de cette culture. Parce que c’est assez spectaculaire quand ça se produit», résume en entrevue Geneviève Pettersen, que la culture de l’annulation fascinait bien avant qu’elle-même n’en soit la cible.
Précision importante: le film ne touche pas aux cas où il y a allégations d’inconduites sexuelles. Il n’est donc pas question, par exemple, des projets annulés de Maripier Morin. On s’attarde plutôt à des situations comme celles de l’annulation du spectacle SLĀV, de Robert Lepage, en 2018, des prises de parole contre les sœurs Stratis (dont l’une témoigne, après avoir été blâmée d’allégations d’abus psychologiques en milieu de travail), ou encore de liberté académique, à travers l’affaire Verushka Lieutenant-Duval de l’Université d’Ottawa et le «mot en N».
«Ce sont des histoires où des gens comme moi ont fait une erreur – parfois grave –, où des gens ont eu des propos problématiques, qui ont choqué», note Geneviève Pettersen, qu’on voit même demander à son patron, dans le documentaire, pourquoi il ne l’a pas congédiée après sa gaffe.
En visionnant Le tribunal populaire, on constate qu’il n’y a pas de «bonne» ou de «mauvaise» réponse à la culture de l’annulation. Chaque partie a son point de vue et sa sensibilité propres. Geneviève Pettersen s’attriste surtout du climat négatif qui règne en ce moment sur les plateformes virtuelles.